Page:Ivoi - Massiliague de Marseille.djvu/364

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laires. L’exploitation devait, en plan, figurer assez exactement un échiquier.

Grâce à cette disposition, les resineros pouvaient sans peine atteindre toutes les lianes à caoutchouc et la récolte devenait facile.

L’intendant se dirigeait dans ce dédale avec une aisance qui indiquait sa parfaite connaissance des lieux.

Soudain, il fit halte.

À quelques pas de lui, une femme, en costume mi-parti indien, mi-parti mexicain, était assise sur un tronc d’arbre, surveillant le mince filet de sève qui coulait d’une liane dans un vase de terre.

De la dextre, cette dernière tenait une baguette dont elle se servait pour agiter de temps à autre le liquide ainsi recueilli.

Cristobal mit le chapeau à la main, puis, d’une voix respectueuse :

— Doña, murmura-t-il. La femme se retourna et montra le doux visage de Dolorès.

— Ah ! c’est vous, mon ami.

— Oui, doña.

— Y aurait-il quelque chose de nouveau ?

— Don Ramon vient de passer près de la resineria.

— Ah !

La jeune fille se dressa sur ses pieds. Dans ses yeux, l’anxiété se lisait.

Comme hésitante, elle reprit :

— Aurait-il des soupçons ?

— Non, non, doña, rassurez-vous. Quoique, pour dire toute la vérité, le soupçon aurait pu germer dans sa tête.

— Qu’entendez-vous par là ?

— J’entends ce que je vais vous faire entendre à vous-même.

Comme il prononçait ces mots, un nouveau personnage parut, vêtu en peone et portant une écuelle de terre où tremblotait le caoutchouc liquide.

— Pécaïre ! s’exclama-t-il, mon petit pot est rempli ; il m’en faudrait un autre.

C’était Scipion Massiliague.

En apercevant le mulato, il s’arrêta net, mais, se remettant aussitôt :

— Té, bonjour, moussu Cristobal, et autremain, la santé va bien ?