Page:Ivoi - Massiliague de Marseille.djvu/392

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porte de la cour et détalèrent à toute bride, tandis que les complices de Sullivan, dont trois gisaient sur le sol, tiraient au hasard dans la nuit.

Joë d’ailleurs ne séjourna pas longtemps dans le tambo. Il comprit que, s’il attendait la venue des habitants du village, ceux que la Mestiza avait laissés en arrière auraient seulement à prononcer son nom pour qu’il fût fait à lui-même un mauvais parti.

Avec Bell et le dernier soldat valide qui lui restât, il prit le large. Certes, il eût eu plaisir à briser le crâne du Marseillais endormi, mais auprès de Scipion, Marius et Coëllo veillaient, le revolver au poing.

Quand les peones, habitants du village, arrivèrent, il ne restait plus au tambo que le Provençal endormi et ses deux compagnons.

En apprenant l’attaque dirigée contre Dolorès Pacheco, tous ces braves gens s’indignèrent. Ils battirent les environs, avec l’espoir de rejoindre les Nordistes et de les punir ; ce fut peine perdue. Sullivan et ses amis avaient réussi à se mettre en sûreté.

Cependant, auprès du lit sur lequel on avait porté Massiliague, Coëllo avait avec Marius une conversation intéressante à en juger par l’éclat du regard, par la rougeur qui couvrait les joues du faux peone.

— Séparé de la doña, disait-elle, le señor ne pourra plus arriver en temps utile à Mexico.

— Cela m’en a tout l’air, déclara philosophiquement Marius.

— Alors, il retournera en France.

— Sans doute ! et il aura bien raison.

— Raison ? gémit la jeune fille.

— Mais oui, monsieur Coëllo, répliqua Marius, se méprenant sur la portée de l’exclamation de celle qu’il continuait à prendre pour un adolescent. Il est de Marseille, c’est-à-dire de la plus belle ville du monde

— La plus belle ville, répéta-t-elle tristement.

— Oui, la plus belle et de beaucoup. Si bien que s’il le permet…

— S’il le permet ?

— Je l’accompagnerai.

Vera inclina la tête et parut réfléchir. Au bout d’un instant, elle sortit de la chambre, gagna l’écurie. Là, près des cadavres des chevaux auxquels on avait coupé les jarrets, gisait sur la paille une petite valise