Page:Ivoi - Massiliague de Marseille.djvu/408

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— Les chercher. Ah ! mon frère savait bien ce qu’il faisait en ajoutant son terrible post-scriptum. Est-ce que je puis dire à un inconnu : Sous le bras gauche, inconnu, portes-tu ces lettres ? On rirait et cependant, celui que je regrette se présentera peut-être un jour devant moi… ou bien il s’est présenté… et je l’ai laissé s’éloigner.

L’hacendado se tordit les mains :

— Oh ! l’horrible doute… Pourquoi ces idées m’assiègent-elles ? Parce qu’un jeune homme, un enfant, est là, blessé. Il se pencha sur le malade.

— Si c’était lui !

Mais il se recula brusquement :

— Stupide, stupide !… gronda-t-il.

Pourtant il se rapprocha de la couchette.

— Il n’a pas conscience… je pourrais m’assurer… au moins je retrouverais la tranquillité dans le présent.

Puis, par réflexion :

— N’ai-je pas le prétexte nécessaire ? Panser sa blessure… c’est le bras gauche qui est atteint justement.

Une dernière hésitation lui vint :

— Je tremble… C’est de la démence, en vérité.

Mais soudain il parut se décider :

— Allons, fit-il d’un ton résolu, ayons au moins le courage de lutter contre les idées qui jettent le trouble dans mon cerveau.

Avec hâte, comme s’il craignait de tergiverser encore, le señor Rosales mit à nu le bras de Cigale.

Avec des précautions infinies, il enleva le bandage qui obturait la blessure. Il lava celle-ci, la pansa. Et quand ces précautions furent prises, assuré qu’aucun accident ne pouvait se produire, il saisit le poignet du jeune homme et tout doucement, sans secousse, il l’éleva en l’air.

Toujours plongé dans une inertie inexplicable, Cigale assistait, sans rien y comprendre, à cette scène étrange.

Cependant Rosales avait élevé son bras verticalement. Soudain il eut un sourd rugissement :

— Les lettres ! les lettres !

— Hein ? fit en écho le Parisien, galvanisé par ces deux mots.

— Les lettres, les lettres, redisait l’hacendado avec extase… là… là… F. R…