— Non, une question seulement ! Vous êtes courageux et vous avez besoin d’argent ?
— Alors, c’est une affaire que vous allez me proposer ?
— Juste !
— Faites vite, des amis m’attendent.
— Il s’agit d’une besogne dangereuse, bien rétribuée.
Armand hésita. Il n’avait aucune raison pour se lancer dans une entreprise hasardeuse ; car, maintenant, avec le dollar qu’il possédait, il était sûr de se procurer la somme promise à sir Murlyton ; mais un secret instinct l’intéressait à la proposition de ce Chinois. Et puis, il ne risquait rien à voir venir.
— Je reste libre de refuser si les conditions ne me conviennent pas ?
— Oui.
— Que faut-il faire ?
— Venez ce soir, à dix heures, à l’angle sud du square Alta-Plaza.
— À la limite de la ville chinoise ?
— C’est cela ! On vous conduira à l’endroit où vous apprendrez ce que l’on attend de vous.
— À dix heures, je serai au rendez-vous.
Et, en aparté, il murmura :
— Mâtin !… en voilà de la couleur locale.
Sur ce, le lettré à bouton d’ambre tira de son côté et Lavarède du sien.
— Ah ! s’écria Murlyton, je n’aurais pas permis que vous cherchiez de l’argent pour moi si j’avais su que vous deviez encore risquer vos jours.
— Ne parlons plus de cela, interrompit le jeune homme. Très pittoresque, n’est-ce pas, ce duel dans la rue ? Cela me fera une chronique amusante… au retour. Pour le moment, allons à l’office du Californian-Times.
Au bureau du journal, l’Anglais stylé par Lavarède obtint, pour un dollar, l’insertion de l’annonce suivante :
« Moyen sûr de gagner aux courses. Écrire V. R., 271, au bureau du journal. Joindre dix cents. »
— Avec cette annonce, dit le jeune homme a ses compagnons en sortant, nous aurons demain ce qu’il nous faut et au delà.
— C’est bien possible, remarqua l’Anglais, la bêtise humaine est incommensurable, mais quel est le moyen sûr que vous promettez ?
Lavarède haussa les épaules et, en riant :
— Ne jouer que sur les gagnants.
— Oh ! déclara vivement miss Aurett, cela n’est pas honnête !