Page:Ivoi Les cinq sous de Lavarède 1894.djvu/185

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
182
LES CINQ SOUS DE LAVARÈDE

— Alors, vous allez être satisfaite.

Un « hansom » passait. Sur un signe du gentleman, la voiture vint se ranger contre le trottoir. Les Anglais y prirent place. Mais déjà, le propriétaire, attentif à tous leurs mouvements, arrêtait un autre véhicule. La jeune miss lui montra le poing avec colère.

— C’est trop fort ! il prétend ne pas nous quitter !

Murlyton haussa les épaules et, montrant une livre sterling au « cabby », juché sur le siège.

— Vous voyez ceci ? dit-il paisiblement.

— Oui, gentleman !

— C’est à vous si vous distancer le cab.

— Où allons-nous ?

— Où vous voudrez.

All right !

L’homme rassembla les rênes, enleva son cheval d’un coup de fouet et la voiture partit bon train. Le cab de Bouvreuil s’ébranla et suivit à la même allure. Durant quelques minutes, les deux véhicules maintinrent leur distance. Soudain, un rassemblement barra le passage.

— Bon ! grommela le gentleman, il ne manquait plus que cela ! Nous sommes cernés.

Mais la promesse d’une guinée donne de l’esprit à un cocher. Celui du « hansom » leva son fouet en l’air et, d’une voix retentissante cria :

— Service de la police !

Les badauds s’écartèrent aussitôt pour se reformer en masse plus compacte après le passage de la voiture. Aurett battit des mains toute joyeuse. Moins adroit ou moins stimulé, l’automédon de Bouvreuil parlementait avec la foule qui refusait de lui faire place.

Pendant ce temps, le « hansom » roulait rapidement, se jetait dans une rue transversale et disparaissait. Bouvreuil était battu. Dépité au possible, il revint au China-Pacific-Hotel. Il lui restait une chance de retrouver les fugitifs. C’était de consulter le « tableau du mouvement du port », afin de savoir quels bateaux devaient prendre la mer dans la journée.

Comme il y arrivait, un homme sortait de l’hôtel. C’était Vincents qui, sa garde terminée, était venu demander à master Tower s’il n’avait pas revu son pseudo-cousin.

Sur sa réponse négative, il s’en allait, haussant les épaules. Bouvreuil le reconnut : c’était le convive amené à deux reprises à la table d’hôte par Lavarède, personnage qui l’avait fort intrigué. L’occasion était trop belle