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LE PAYS DES LAMAS.

— Bouddha, le très bon, dit le grand prêtre, errer est le propre des humains… Pardonne donc à l’avance ce que j’ai à te dire.

— J’écoute, répliqua le Parisien, reprenant tout son sang-froid.

Le lama continua après une salutation.

— Un franc-maçon blanc comme toi, condamné à mort par le Tsong-Li-Yamen, s’est enfui de la capitale impériale en dérobant une machine à voler dans les airs.

— Ah ! Et vous voulez le retrouver ?…

La question jetée par le dieu parut interloquer les visiteurs.

— Ce n’est pas cela…

— Non, déclara d’un ton piteux le Tag-Lama, mais le mandarin Sandyama, ici présent, chef de la police de la route secrète du Yunnan, a reçu l’ordre de faire des recherches pour retrouver le fugitif… Le bruit de ton arrivée miraculeuse est parvenu jusqu’à lui et il est accouru. Malgré les rites qui défendent l’entrée nocturne des pagodes aux profanes, je l’ai reçu tant sa prière était pressante. Ses soldats sont dans la cour. Permets que je lui montre ton char aérien afin d’écarter le doute de son esprit.

Armand réfléchissait. Soudain, il regarda fixement Rachmed et l’Anglais, puis, s’approchant du Tag-Lama, il lui mit la main sur l’épaule.

— À quoi bon cette visite ? dit-il. Il suffisait de me demander où est le voleur, je te l’aurais appris.

Rachmed s’était dressé également. Pour traduire les paroles du faux Bouddha il s’était glissé entre le prêtre et le policier.

— C’est vrai, murmura le Tag-Lama, tu consentirais donc… ?

— À vous mettre sur la voie, oui, certes.

Sandyama se frotta les mains.

— Où se cache-t-il, puissant seigneur ?

— Près d’ici.

— Vraiment ?

Lavarède adressa un coup d’œil au gentleman qui, à son tour, fut debout aussitôt.

— Désignez l’endroit, implorait le policier.

— Volontiers, car il est à portée de ton bras.

— Oh ! Bouddha, prouve-moi cela.

— Tu le veux ?

— Je t’en conjure !

— Et bien, sois donc satisfait.

Et lançant brusquement en avant ses poings fermés, il atteignit en