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Page:Ivoi Les cinq sous de Lavarède 1894.djvu/376

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PHILOSOPHIE ALLEMANDE.

Il guignait Lavarède en dessous. Ce diable d’homme qui passait sans effort, en se jouant, à travers tous les obstacles. Et une idée grandissait dans son cerveau.

— S’il le voulait, il me tirerait de là. Oui, mais comment l’y décider ?

Le train avait franchi la frontière autrichienne à Vereierova.

On était au milieu de la nuit. Les policiers, n’ayant qu’un prisonnier à garder, avaient décidé qu’au lieu de veiller à tour de rôle, tous deux dormiraient. Les portières verrouillées et une chaîne d’acier enroulée autour des chevilles de Bouvreuil suffiraient à empêcher son évasion.


Muller le coucha sur la banquette.

Le propriétaire s’assura que les Autrichiens, un peu las des journées précédentes, étaient profondément endormis, puis il tira par la manche le journaliste qui sommeillait.

Celui-ci ouvrit les yeux.

— C’est moi, dit l’usurier.

— Le diable vous emporte, grommela le jeune homme, je faisais un joli rêve… C’était bien la peine de me mettre sous les yeux une aussi vilaine réalité.

— Ne vous emportez pas, j’ai une proposition à vous faire.

— Inutile, monsieur Bouvreuil, je ne travaillerai pas avec vous, j’ai les mains propres.

Le captif se mordit les lèvres. Mais il fallait digérer l’injure, quitte à s’en venger plus tard. Il prit son air le plus aimable.

— Toujours le mot pour rire.

— Cela vous amuse, tant mieux.

— Une question. Si vous étiez prisonnier comme moi, vous arriveriez à fausser compagnie à vos gardiens, n’est-ce-pas ?