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LES CINQ SOUS DE LAVARÈDE

flots bleus, la ville de Messine, inondée de soleil, se montre étagée autour de son port.

Sans perdre un instant, Langlois et Yan mettent à flot le « démontable ». Don José Miraflor rit d’un mauvais rire.

— Nous verrons bien si les autorités italiennes permettront à monsieur Lavarède de ramener mon torpilleur en France ! dit-il à Bouvreuil.

Le journaliste tressaille. Le rastaquouère va porter plainte. Le bateau sera confisqué jusqu’après enquête. Des plans en seront dressés et l’invention française deviendra une arme pour l’Italie. Non, cela ne sera pas. Et le regard du jeune homme s’irradie d’exaltation sainte.

Tous les voyageurs ont pris place dans le canot avec des provisions soigneusement emballées par le Parisien. Les avirons sont bordés. Alors Armand a un geste farouche.

— À ma place, Goubet le ferait, murmure-t-il.

On le voit disparaître dans l’intérieur du sous-marin. Deux minutes s’écoulent. Le jeune homme revient un peu pâle. Il s’élance dans le canot et s’adressant aux matelots :

— À force de rames, les enfants !

Les Malouins ne comprennent pas, mais ils obéissent. La distance qui les sépare du bateau sous-marin augmente rapidement. Cent, deux cents, trois cents mètres sont franchis.

Brusquement, une détonation effroyable déchire l’air. Une colonne de feu et de fumée s’élève au-dessus du torpilleur, qui se perd dans un énorme remous.

— Il y avait de la poudre à bord, dit alors Lavarède les yeux brillants d’enthousiasme, j’ai fait sauter le Goubet !

Et, avec le sourire le plus ironique :

— Señor Miraflor, ajoute-t-il, vous devez être satisfait… Les débris du navire resteront dans les eaux italiennes.