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À LA COURSE.

Le jeune homme eut un doux regard à l’adresse d’Aurett ; puis il s’approcha de maître Panabert.

— Aujourd’hui, 25 mars, à cinq heures, c’est-à-dire en gagnant une heure sur le délai fixé par feu mon cousin Richard, j’ai accompli le tour du monde en ne dépensant que vingt-cinq centimes. Jusqu’à Messine, sir Murlyton, ici présent, me contrôlait ; à partir de ce point, voici des certificats qui établissent l’emploi de mon temps. Veuillez vérifier, maître Panabert. Un mot cependant. À Sens, ce matin, j’ai pris un vélocipède ; je n’ai aucun papier le prouvant, mais demain les journaux en parleront ; c’est, je crois, suffisant.

Puis, pendant que le notaire feuilletait les constatations, il se tourna vers l’usurier et, un peu narquois, bien que très poli :

— Mademoiselle Pénélope m’a prêté votre bicyclette. Elle est excellente. On me la garde en bas, vous pouvez la reprendre… Vous remercierez bien mademoiselle votre fille de ma part.

— Tout cela est parfaitement en règle, déclara le notaire ; mes compliments, monsieur, l’héritage est à vous… Un détail seulement, en votre absence, mon cher monsieur, des créanciers vous ont poursuivi. Votre concierge se souvenant de mon adresse est venue me consulter. Et moi, certain que vous voudrez bien me conserver votre clientèle, j’ai pris la liberté de faire porter ici tous les papiers timbrés, protêts, jugements, commandements, saisies, etc., afin de procéder au règlement dès votre retour.

Le journaliste se prit à rire.

— Je n’ai qu’un seul créancier, c’est monsieur Bouvreuil. Il avait racheté toutes les créances et les avait confiées à des huissiers divers, à ce que je vois.

— Dame ! vingt liasses au moins de papier timbré font une somme de frais de douze mille francs au moins.

— Vous remettrez le compte à monsieur… c’est lui qui règle cela, ainsi qu’en fait foi l’écriture que voici…

Il présentait la quittance complète et définitive remise par l’usurier près de Szegedin. Le père de Pénélope poussa un sourd grognement.

— Tout est liquidé, reprit joyeusement le jeune homme. Après les satisfactions d’amour-propre, donnons-en une à l’amour pur.

Et s’inclinant devant le gentleman :

— Mon cher ennemi, dit-il d’une voix émue, j’ai l’honneur de vous demander la main de mademoiselle votre fille.