longtemps négligé l’éducation du fils qui devait succéder à sa couronne. Quels étranges précepteurs reçut Louis II ! On semblait prendre plaisir à développer en lui l’imagination sans règle, la mélancolie sans cause, le penchant à la rêverie, en même temps qu’un dangereux et inconscient égoïsme. Les premiers mois de notre langue que lui enseigna sa gouvernante française furent « L’État c’est moi », et « Tel est notre bon plaisir ».
Sur d’autres points, cette éducation de prince surprend par sa sévérité. Le jeune Louis fut, sans raison, soumis à une réclusion presque monastique. C’est à peine s’il connut quelques compagnons de jeu : son frère Othon, son cadet de trois années, les fils de deux fonctionnaires de la cour. On dit que les médecins, l’ayant cru phtisique, l’entourèrent de soins exagérés. En tout cas, on prépara, avec une merveilleuse sollicitude, un terrain éminemment favorable au dégoût de l’activité et à la misanthropie.
Dans cette demi-solitude, deux penchants se développèrent chez le jeune prince. L’orgueil d’abord. La conscience que cet enfant avait de sa personnalité était étrangement forte. Le sentiment de la dignité royale revêt déjà chez lui des formes inquiétantes quand il refuse, par exemple, de se laisser toucher par personne, pas même par le médecin, et, pour se mettre à l’abri des potions, invoque, assez spirituellement, le crime de lèse-majesté.
Mais déjà l’adolescent prenait goût à la solitude et se plaisait à entretenir et à orner ses songeries. La vieille résidence de Munich où s’écoulait cette enfance montre sur sa façade l’emblème du roi soleil. Au dedans, ce ne sont que voûtes immenses, sombres corridors : rien des Tuileries ni du Louvre. Le luxe même de ces royautés aux listes civiles avaricieusement marchandées par des Chambres