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Page:Jacques Bainville - Louis II de Bavière.djvu/58

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La ville sainte du wagnérisme lui fit un accueil enthousiaste. Deux jours plus tard, il regagnait Munich en hâte, ne voulant sans doute pas, dans sa misanthropie croissante, se rencontrer avec les empereurs d’Allemagne et du Brésil et le prince Constantin de Russie, qui devaient arriver bientôt, suivis de la foule cosmopolite que commençait d’attirer Bayreuth. Quand le cortège des princes se fut éloigné, Louis II consentit à revenir. Et cette fois, en plein théâtre, le public des amateurs, instruit de la part qu’il avait prise au succès définitif de Wagner, fit au roi une ovation splendide. Louis en avait, dit-on, les yeux remplis de larmes.

Dans la suite, ses relations avec Richard Wagner restèrent amicales, mais l’intimité était rompue. Chaque fois que le musicien passait à Munich, il était reçu par le roi. Le 21 avril 1882, il fut encore invité ainsi que sa femme à assister à une représentation particulière de Lohengrin. Au dernier passage de Wagner à Munich, à la fin de cette même année, le roi, plus assombri, plus solitaire que jamais, ne reçut pas son grand ami. Enfin, lorsque Wagner mourut à Venise, dans le palais Vendramin, le 13 février 1883, le souvenir de sa jeunesse, de ses enthousiasmes, de son ardeur au dévouement et à l’amitié, revint-il à l’esprit de Louis II ? On ne sait. D’étranges visions commençaient d’emplir sa tête. Cependant, il n’avait pas oublié. Il chargea un des officiers de sa maison de le représenter aux obsèques.

Cette amitié historique fut aussi riche en conséquences pour le favori que pour le protecteur. Mais, n’est-il pas déjà évident qu’elle leur rendit, à l’un et à l’autre, des services inégaux ?