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Cosmopolite, et l’œuvre royale de Charles VI, Paris, 1618, 1629, in-8o. On le fait encore auteur du Grand éclaircissement de la pierre philosophale pour la transmutation de tous métaux, in-8o, Paris, 1628. L’éditeur promettait la Joie parfaite de moi, Nicolas Flamel, et de Pernelle, ma femme, ce qui n’a point paru. On a donné enfin la Musique chimique, opuscule très-rare, et d’autres fatras qu’on ne recherche plus.

Au résumé, Flamel était un homme laborieux qui sut acquérir de la fortune en travaillant avec les juifs, et comme il en fit mystère, on l’attribua à des moyens merveilleux. L’abbé de Villars métamorphose Flamel, dans le Comte de Gabalis, en un chirurgien qui commerçait avec les esprits élémentaires. On a débité sur lui mille contes singuliers ; et de nos jours un chercheur de dupes, ou peut-être un plaisant, répandit en mai 1818, dans les cafés de Paris, une espèce d’avertissement où il déclarait qu’il était le fameux Nicolas Flamel qui recherchait la pierre philosophale au coin de la rue Marivaux, à Paris, il y a plus de quatre cents ans ; qu’il avait voyagé dans tous les pays du monde, et qu’il prolongeait sa carrière depuis quatre siècles par le moyen de l’élixir de vie qu’il avait le bonheur de posséder. Quatre siècles de recherches l’avaient rendu, disait-il, très-savant et le plus savant des alchimistes. Il faisait de l’or à volonté. Les curieux pouvaient se présenter chez lui, rue de Cléry, no 22, et y prendre une inscription qui coûtait trois cent mille francs, moyennant quoi ils seraient initiés aux secrets du maître, et se feraient sans peine un million huit cent mille francs de rente.

Flaque (Louis-Eugène), sorcier jugé à Amiens en 1825. On l’accusa d’escroqueries à l’aide d’opérations magiques et cabalistiques, de complicité avec Boury, teinturier, logé rue des HautesCornes, audit Amiens, et encore avec François Russe, laboureur de Conti. — Au mois de mars 1825, la cour royale d’Amiens confirma un jugement par lequel il appert que les trois individus susnommés ont, par des manœuvres frauduleuses, persuadé à des particuliers l’existence d’un pouvoir mystérieux surnaturel ; sur quoi, et pour en user, l’un de ces crédules particuliers remit à Boury la somme de cent quatre-vingt-douze francs ; Boury présenta le consultant à un individu déguisé en démon, dans le bois de Naours. Le démon promit au particulier huit cent mille francs, qui n’arrivèrent jamais. Boury, Flaque et Russe n’en gardèrent pas moins les cent quatre-vingt-douze francs ; mais le bailleur les poursuivit. Boury fut condamné à quinze mois de prison, Flaque et Russe à une année, à l’amende de cinquante francs, et au remboursement des frais, etc.

Voici ce qu’on apprit dans les débats. Boury exerçait l’état de chirurgien dans la commune de Mirvaux ; n’étant pas toujours heureux dans ses cures, il persuadait à ses malades que l’on avait jeté un sort sur eux ; il leur conseillait de chercher un devin plus savant que lui ; cependant il se faisait payer et se retirait. Ces escroqueries n’étaient que le prélude de facéties plus graves. En 1820, le charron Louis Pâque, ayant besoin d’argent, se rendit à Amiens ; là il en emprunta à un menuisier. Boury, qui sut la chose, dit qu’il procurerait de l’argent à meilleur compte, moyennant quelques avances. Le charron alla le trouver ; Boury lui déclara que le meilleur moyen d’avoir des fonds était de se vendre au diable" ; et voyant que Pâque ne reculait pas à une telle proposition, il lui demanda deux cents francs pour assembler le conseil infernal ; Louis Pâque les donna. Boury s’arrangea de façon à toucher ainsi pour frais préliminaires sept à huit mille francs. Enfin il fut convenu qu’en donnant encore quatre louis, Pâque obtiendrait cent mille francs ; malheureusement il s’était fort dépouillé ; il n’en put donner que deux. Il partit néanmoins avec Boury, Flaque, le chef sorcier, et un sieur de Noyencourt, pour le bois de Saint-Gervais. Boury tira d’une de ses poches un papier écrit qu’il fit tenir aux assistants, chacun par un coin. Il était minuit. Flaque fit aussitôt trois conjurations. Le diable ne parut pas. Noyencourt et Boury dirent alors que le diable était occupé ce jour-là ; on prit un autre rendez-vous au bois de Naours. Pâque à cet autre rendez-vous mena sa fille avec lui ; pauvre fille ! Mais Boury lui avait dit qu’il fallait que son premier-né assistât à l’opération. Flaque et Boury appelèrent le diable en latin. Le diable enfin parut. Il avait une redingote rouge-bleuâtre, un chapeau galonné. Il portait un sabre. Sa taille était d’environ cinq pieds six pouces. Le nom de ce démon était Robert, et celui du valet qui l’accompagnait Saday. Boury dit au diable : — Voici un homme que je te présente ; il désire avoir quatre cent mille francs pour quatre louis, peux-tu les lui donner ? — Le diable répondit : — Il les aura. — Pâque lui présenta l’argent ; et le diable lui fit faire le tour du bois en quarante-cinq minutes, avec Boury et Flaque, avant de bailler les quatre cent mille francs. L’un des sorciers perdit même un de ses souliers dans la course. Pâque, à son détour, aperçut une table et des chandelles dessus ; il poussa un cri : — Tais-toi, lui dit Flaque, ton cri a tout perdu ; l’affaire est manquée. — Le stupide charron s’enfuit à travers le bois ; puis reprenant courage, il revint devant le diable, qui lui dit : — Scélérat, tu as traversé le bois au lieu d’en faire le tour. Retire-toi sans te retourner, ou je te tords le cou…

Mais ce n’était pas fini. Une autre opération eut encore lieu dans le même bois ; quand Pâque cette fois demanda l’argent, le diable lui dit : — Adresse-toi au bureau. — C’était un buisson…