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Page:Jacques Collin de Plancy - Dictionnaire infernal.pdf/407

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Lamproies, poissons auxquels on a donné neuf yeux ; mais on a reconnu que c’était une erreur populaire, fondée sur ce que les lamproies ont sur le côté de la tête des cavités, qui n’ont aucune communication avec le cerveau[1].

Lancinet. Les rois de France ont de temps immémorial revendiqué l’honneur de guérir les écrouelles. Le premier qui fut guéri fut un chevalier nommé Lancinet. Voici comment le fait est conté :

« Il était un chevalier nommé Lancinet, de l’avis duquel le roi Clovis se servait ordinairement lorsqu’il était question de faire la guerre à ses ennemis. Étant affligé de cette maladie des écrouelles, et s’étant voulu servir de la recette dont parle Cornélius Celsus, qui dit que les écrouelles se guérissent si l’on mange un serpent, l’ayant essayée par deux fois, et ce remède ne lui ayant point réussi, un jour, comme le roi Clovis sommeillait, il lui fut avis qu’il touchait doucement le cou à Lancinet, et qu’au même instant ledit Lancinet se trouvait guéri sans que même il parût aucune cicatrice.

» Le roi, s’étant levé plus joyeux qu’à l’ordinaire, tout aussitôt qu’il lit jour, manda Lancinet et essaya de le guérir en le touchant, ce qui fut fait ; et toujours depuis, cette vertu et faculté a été comme héréditaire aux rois de France, et s’est transmise à leur postérité[2]. »

Voilà, sans contredit, un prodige ; mais on représentera que personne ne se nommait Lancinet du temps de Clovis ; que ni Clovis, ni Clotaire, ni le roi Dagobert, ni aucun des Mérovingiens ne se vantaient de guérir les humeurs froides ; que ce secret fut également inconnu aux Carlovingiens, et qu’il faut descendre aux Capétiens pour en trouver l’origine[3].

Landat ou Landalde (Catherine), paysanne des frontières de l’Espagne. Deîancre dit qu’interrogée sur ses voyages au sabbat, elle déclara qu’elle n’avait pas besoin de dormir pour s’y rendre ; que dès qu’elle s’asseyait près de son feu, si elle sentait un grand désir d’aller au sabbat, elle s’y trouvait aussitôt transportée. Cette femme avait trente ans.

Landela, magicienne. Voy. Harppe.

Langeac, ministre de France, qui employait beaucoup d’espions, et qui fut souvent accusé de communiquer avec le diable[4].

Langue. On lit dans Diodore de Sicile que les anciens peuples de la Taprobane avaient une langue double, fendue jusqu’à la racine, ce qui animait singulièrement leur conversation et leur facilitait le plaisir de parler à deux personnes en même temps[5]. Mahomet vit dans son paradis des anges bien plus merveilleux ; car ils avaient chacun soixante-dix mille têtes, à chaque tête soixan te-dix mille bouches, et dans chaque bouche soixante-dix mille langues qui parlaient chacune soixante-dix mille idiomes différents.

Les sorcières prétendaient avoir le don de parler toutes les langues : ce qui ne s’est pas vérifié, sinon dans quelques possédées.

Langue primitive. On a cru autrefois que si on abandonnait des enfants à la nature, ils apprendraient d’eux-mêmes la langue primitive, c’est-à-dire celle que parlait Adam, que l’on croit être l’hébreu. Mais malheureusement l’expérience a prouvé que cette assertion n’était qu’une erreur populaire[6]. Les enfants élevés par des chèvres parlent l’idiome des boucs, et il est impossible d’établir que le langage n’a pas été révélé.

Languet, curé de Saint-Sulpice, qui avait un l aient tout particulier pour l’expulsion de certains esprits malins. Quand on lui amenait une de ces prétendues possédées que les convulsion naires ont produites, et qui ont donné matière à tant de scandales, il accourait avec un grand bénitier plein d’eau commune, qu’il lui versait sur la tête en disant : « Je t’adjure de te rendre tout à l’heure à la Salpêtrière, sans quoi je t’y ferai conduire à l’instant. » La possédée ne reparaissait plus.

Lanthila, nom que les habitants des Moluques donnent à un être supérieur qui commande à tous les Nétos ou génies malfaisants.

Lapalud. Voy. Palud.

Lapons. Les Lapons se distinguent un peu des autres peuples : la hauteur des plus grands n’excède pas un mètre et demi ; ils ont la tête grosse, le visage plat, le nez écrasé, les yeux petits, la bouche large, une barbe épaisse qui’leur pend sur l’estomac. Leur habit d’hiver est une peau de renne, taillée comme un sac, descendant sur les genoux, et rehaussée sur les hanches d’une ceinture ornée de plaques d’argent ; ce qui a donné lieu à plusieurs historiens de dire qu’il y avait des hommes vers le Nord velus comme des bêtes, et qui ne se servaient point d’autres habits que ceux que la nature leur avait donnés.

On dit qu’il y a chez eux une école de magie où les pères envoient leurs enfants, persuadés que la magie leur est nécessaire pour éviter les embûches de leurs ennemis, qui sont eux-mêmes grands magiciens. Ils font passer les démons familiers dont ils se servent en héritage à leurs

  1. Brown, Des erreurs populaires, t. I, liv. III, p. 349.
  2. Delancre, Traité de l’attouchement, p. 159 ; Forcadel, De imper. et philosop. gall.
  3. M. Salgues, Des erreurs et des préjugés, etc., t. I, p. 273.
  4. Bertin, Curiosités de la littérature, t. I, p. 51.
  5. M. Salgues, Des erreurs et des préjugés, t. III, p. 419.
  6. Thomas Brown, Essai sur les erreurs, t. II, ch. xxiii, p. 95.