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L’ÉCOLE DES MARIAGES

toujours sur les épaules de ma fille… Il faut que je la protège contre elle ! Vous comprenez maintenant, monsieur Delville, à quel point j’ai été furieux, lorsque j’ai appris que vous conduisiez Edmée à une idée contre laquelle je n’ai pas cessé depuis dix ans de la mettre en garde. C’est mon œuvre de vigilance que vous êtes venu détruire étourdiment… Oui, je sais, vous ignoriez tout… J’ai peut-être été vif avec vous, mais songez que je voyais surtout en vous l’homme qui allait me ravir la vie de mon Edmée !… Enfin, passons. Ce que je vous demande, c’est de vous soumettre à ma prière, quelque cruelle qu’elle vous paraisse… Mais je suis bien sûr que si vous aimez ma fille comme vous le dites, vous ne ferez rien pour troubler sa santé et… que vous renoncerez à votre projet…

C’étaient maintenant des yeux suppliants qui se levaient vers René, des yeux timides et craintifs. Dans un brusque changement de rôle, cet homme orgueilleux et fier, mais affolé par le danger que courait son enfant, semblait attendre en tremblant la décision de Delville.

René se remit à balbutier :

— Évidemment, monsieur, si j’avais pu soupçonner une telle chose ! Mon Dieu ! quelle fatalité ! Vous avez ma parole : je ne soufflerai mot à personne de tout ceci… Mais ne disiez-vous pas que vous attendiez pour la marier que Mlle Edmée fût plus forte ? Pourquoi n’attendrai-je pas aussi ? Je l’aime, je vous assure, d’une passion qui n’est pas un caprice. J’attendrai autant que vous le désirerez…

M. Diamanty laissa échapper un geste de contrariété qui fit claquer le papier qu’il tenait tou-