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EDMOND JALOUX

jours au bout des doigts. La petite voix sèche et sifflante se remit à l’œuvre avec plus de vivacité encore et quelque ironie :

— Oui, n’est-ce pas, et, en attendant, vous continuerez à voir ma fille et à la rencontrer, ici et là, et à lui faire des déclarations. Mais c’est ce que je ne veux pas, sacristi ! Ma fille s’est amourachée de vous, il faut empêcher que cet enfantillage devienne une passion réelle. Vous devez cesser de la voir, ne pas vous rendre chez nos amis communs les jours où elle doit y aller… Ne comprenez-vous pas que si elle devenait vraiment amoureuse de vous, elle ferait tout au monde pour vous épouser ? Et puis, je ne veux pas qu’elle sache la vraie raison de mon refus. Pensez donc ! Si elle allait se croire malade !

— Et un amour contrarié et… cette fièvre de la passion peuvent compromettre la santé d’Edmée et lui donner ce mal que je redoute, dont je fais tout pour la préserver et que je sens rôder, toujours, autour d’elle.

Il y eut un silence. Le mot d’enfantillage appliqué par M. Diamanty à l’amour de sa fille offusquait René. Peu habile à considérer les choses dans leur ensemble, il n’en retenait guère qu’un détail sur lequel travaillait son esprit. Et il s’arrêtait plus aisément à un terme qu’à une idée.

— Mais que direz-vous à Mlle Edmée pour lui expliquer cela… qu’elle doit cesser de… penser à moi ?

Cette question naïve et maladroitement insignifiante donna à M. Diamanty un haut-le-corps cabré.

— Cela me regarde, monsieur, et d’ailleurs… Enfin, passons. Il me suffira de dire à ma fille que