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Page:Jaloux - Le reste est silence, 1910.djvu/99

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LE RESTE EST SILENCE…

on croyait entendre frémir par les courants de l’air le céleste frou-frou…

Nous grimpâmes dans un tramway ; les deux chevaux qui le traînaient trottinaient gaîment, comme s’ils fussent fiers, eux aussi, de transporter une promeneuse aussi élégante et aussi jolie, et comme s’ils avaient envie, ainsi que papa, de la montrer avec orgueil partout où elle passait. Les platanes étaient clairs sous leur écorce qui s’en allait en haillons. Ils avaient l’air de se dire les uns aux autres : « Ouf ! Ce n’est pas malheureux de quitter enfin cette carapace et de sortir en tenue de printemps ! » Il y avait, sous leur ombre, encore très clairsemée, des nourrices aux larges rubans de couleurs criardes, qui charriaient des enfants, d’élégantes petites filles guindées, aux longs cheveux, des garçons turbulents, bruyants et batailleurs, qui me rappelaient fâcheusement mes cousins. On entendait les sonnettes aigres des cerceaux, les trompes rauques des bicyclettes, le claquement léger des fouets d’enfants, des roulements de voitures, des cris joyeux qui mon-