Page:James - Le Tour d’écrou (trad. Le Corbeiller), 1968.djvu/27

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prétention d’être la seule. En tout cas, mon autre élève, à ce que j’ai compris, arrive demain ?

— Pas demain, mademoiselle, vendredi. Il arrivera comme vous, par la diligence, sous la surveillance du conducteur ; on lui enverra la même voiture qu’à vous. »

Je hasardai alors la question de savoir s’il ne serait pas convenable, autant que gentil et amical, de me trouver avec sa petite sœur à l’arrivée de la voiture publique. Mrs. Grose accéda si cordialement à cette proposition qu’elle me donna l’impression de prendre, pour ainsi dire, l’engagement réconfortant — il fut toujours fidèlement tenu. Dieu merci ! — d’être de mon avis sur tous les sujets. Qu’elle était donc contente que je fusse là !

Ce que j’éprouvai, le jour suivant, ne peut vraiment pas s’appeler une réaction contre l’allégresse de mon arrivée. Ce n’était probablement, au pire, qu’une légère oppression, due à une observation plus précise des circonstances qui m’entouraient, lorsque, pour ainsi dire, j’en fis le tour, je les examinai, je m’en pénétrai. Elles avaient, ces circonstances, une étendue et une masse auxquelles je n’étais pas préparée. En face d’elles, je me sentis tout d’abord vaguement décontenancée, autant qu’assez fière. Les leçons proprement dites souffrirent certainement de mon agitation : je pensai que mon premier devoir était de créer une intimité entre l’enfant et moi, en usant de toutes les séductions en mon pouvoir. Je passai donc la journée dehors avec elle. À sa grande satisfaction, il fut convenu entre nous que ce serait elle, elle seule, qui me ferait visiter la maison. Elle me la fit visiter pas à pas, pièce à pièce, cachette par cachette, m’entretenant de son amusant et délicieux bavardage enfantin, qui eut pour résultat, au bout d’une demi-heure, de faire de nous une paire d’amies. Tout enfant qu’elle était, elle me frappa, pendant notre tournée, par son courage et son assurance. Toute sa façon d’être, dans les chambres vides et dans les sombres corridors, dans les escaliers en vis où j’étais, moi,