Page:James - Le Tour d’écrou (trad. Le Corbeiller), 1968.djvu/28

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obligée par moments de m’arrêter, — et jusque sur le sommet d’une vieille tour à mâchicoulis qui me donnait le vertige, — oui, son ramage d’aurore, son penchant à donner des explications plutôt qu’à en demander, toute sa manière d’être, exultante et dominatrice, m’étourdissait et m’entraînait. Je n’ai jamais revu Bly depuis le jour où je le quittai, et, sans doute, paraîtrait-il bien diminué à mes yeux vieillis et blasés. Mais tandis que ma petite conductrice, avec ses cheveux d’or et sa robe d’azur, bondissait devant moi aux tournants des vieux murs, et sautillait le long des corridors, il me semblait voir un château de roman, habité par un lutin aux joues de rose, un lieu auprès duquel pâliraient les contes de fées et les plus belles histoires d’enfants. Tout ceci n’était-il pas un conte, sur lequel je sommeillais et rêvassait ? Non : c’était une grande maison vieille et laide, mais commode, qui avait conservé quelques parties d’une construction plus ancienne, à demi détruite, à demi utilisée. Notre petit groupe m’y apparaissait presque aussi perdu qu’une poignée de passagers sur un grand vaisseau à la dérive. Et c’était moi qui tenais le gouvernail !