Page:James Guillaume - L'Internationale, III et IV.djvu/566

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cette bande avait répandue dans la bourgeoisie, pour obtenir une condamnation solennelle. On a déjà exploité cette panique pour faire condamner à Florence quelques socialistes qui, assistant à une réunion publique contre le blasphème, organisée par des cléricaux, avaient protesté aux cris de « Vive l’Internationale ! vive le socialisme ! »

« Comme échantillon des mesures prises par la bourgeoisie terrifiée, je vous dirai qu’à Imola, par exemple, les soldats ne dormaient plus dans leurs casernes, mais campaient sur les places publiques, comme si la ville eût été en état de siège ; des patrouilles de carabiniers, d’agents de police, de soldats, parcouraient sans cesse la ville et les environs, allant parfois jusqu’à Dozza, petit village à sept milles de là, près des montagnes.

« De Forli on avait envoyé des soldats à Rocca San Casciano, craignant que des bandes armées ne pénétrassent de la Romagne en Toscane, ou vice-versa.

« À Bologne, beaucoup ont été arrêtés : quelques-uns ont été relâchés après avoir reçu l’ammonizione, d’autres ont été retenus en prison ; plusieurs ont réussi à échapper aux recherches. Jeudi soir 19 courant, on a fait des perquisitions au domicile de beaucoup de socialistes ; et les lâches qui nous gouvernent, croyant qu’une visite policière pouvait effrayer nos compagnons, voulaient les obliger à signer un papier par lequel ils auraient déclaré qu’ils ne faisaient pas partie ou qu’ils renonçaient à faire partie de l’Internationale.

« Les journaux publient un décret du gouvernement, qui déclare dissous toutes les sections et fédérations, cercles et groupes de l’Internationale, ordonne la fermeture de leurs locaux et la saisie des objets leur appartenant. Les journaux ont soin de nous informer en outre que les ministres ont été unanimes pour rendre ce décret, chose dont nous n’avons pas douté du reste.

« Nous voilà donc de nouveau hors la loi ; mais les socialistes italiens ne s’arrêteront pas pour cela, soyez-en certains. Les persécutions font l’office d’éperon.

« Aujourd’hui même doit être jugé définitivement, devant le tribunal de Pérouse, le procès pour contravention à l’ammonizione intenté à Costa. Ni lui ni son avocat ne pourront être présents ; Costa, recherché avec acharnement par la police, a dû se cacher ; et naturellement il sera condamné. »

Une lettre de Brousse à Kropotkine, du 1er mai, contient le passage suivant : « Nous aurons bientôt des nouvelles d’Italie, car je viens de recevoir une lettre de Costa qui m’annonce sa venue à Berne ; nous verrons à nous arranger pour que vous causiez aussi avec lui ». Dans une autre lettre, sans date, écrite vers le 10 mai, il dit : « Costa est ici. Comme renseignements il n’en sait pas plus que nous, sinon que l’organisation en Italie ne sera en rien entamée par les choses de Bénévent[1] »


Revenant à la Fédération jurassienne, je note, le 28 avril et le 9 mai, des assemblées de la fédération du district de Courtelary ; en tête du Bulletin du 29 avril, l’annonce de la mise en interdit d’un atelier de menuiserie à Zürich, publiée à la demande de la corporation des ouvriers travaillant le bois (Holzarbeiter) ; et dans le même numéro, l’ouverture, sur l’initiative de la Section de langue française de Lausanne et de la Section allemande de propagande de Genève, d’une souscription en faveur des internationaux italiens arrêtés et de leurs familles.

Les élections triennales pour le renouvellement du Grand-Conseil neuchâtelois eurent lieu le dimanche 6 mai. À cette occasion, un correspondant de Neuchâtel fit remarquer qu’une partie des membres de la Section du Grütli de cette ville avaient voté ouvertement pour les candidats conservateurs : « Et voilà des hommes qui prétendent organiser chez nous un parti ouvrier, en concurrence avec l’Internationale ! » À la Chaux-de-Fonds, on n’avait pas renouvelé la comédie de la « Jeune République », au moyen de laquelle, en 1874, les

  1. Une note de mon agenda de 1877 porte : « Vendredi, 11 mai. Je vais voir Costa à Berne. > Je restai auprès de lui et de Brousse jusqu’au dimanche soir.