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Albert Richard, Michel Bakounine, Nicolas Joukovsky, Valérien Mroczkowski, Zagorski, Giuseppe Fanelli, Saverio Friscia, Alberto Tucci.

La minorité dissidente créa aussitôt une nouvelle organisation, sous le nom d’Alliance internationale de la démocratie socialiste, avec un programme que je reproduirai plus loin (au chapitre IV de la Deuxième Partie). Cette Alliance se donna un règlement par lequel elle « se constituait en une branche de l'Association internationale des travailleurs, dont elle acceptait tous les statuts généraux » ; les membres fondateurs devaient désigner provisoirement un Bureau central, résidant à Genève ; dans chaque pays, il devait y avoir un Bureau national, reliant entre eux les groupes locaux de ce pays, et correspondant avec le Bureau central ; au Congrès annuel de l'Association internationale des travailleurs, la délégation de l'Alliance de la démocratie socialiste, comme branche de l'Association internationale des travailleurs, devait tenir ses séances dans un local séparé. Le Bureau central provisoire de l'Alliance fut composé de Bakounine, J.-Ph. Becker, Brosset, Duval, Guétat, Perron et Zagorski, tous membres de l'internationale. J.-Ph. Becker fut chargé d'écrire au Conseil général, à Londres, pour demander l'admission en bloc de l'Alliance internationale de la démocratie socialiste dans l'Association internationale des travailleurs.

Je compléterai ce chapitre en donnant quelques détails qui feront comprendre les raisons de l'action tentée, pendant toute une année, par Bakounine et ses amis, au sein de la Ligue de la paix et de la liberté. Je laisserai parler Bakounine lui-même ; il a raconté ces choses, en 1873, dans un petit livre écrit en langue russe[1], qui s'appelle : Développement historique de l'Internationale (Istoritcheskoé razvitié Internalsionald), au chapitre intitulé L'Alliance internationale des révolutionnaires socialistes (Internatsionalnyi Soïouz sotsialnykh revolutsionérof), p. 301 :


En 1864, pendant son séjour en Italie, Bakounine, avec quelques-uns de ses amis italiens, forma une alliance (soïouz[2]) intime, principalement comme moyen de combattre l'Alliance républicaine qu'avait fondée peu auparavant Mazzini[3] avec une tendance théolo-

  1. C'est le second d'une série de trois petits volumes imprimés, les deux premiers à Zurich, le troisième à Londres, par un groupe de révolutionnaires russes sous le titre général d' « Éditions du parti socialiste révolutionnaire » (Izdanié sotsiatno-revolutsionnoï partii). Les deux autres sont intitulés, le premier : Autoritarisme et Anarchie (Gosoudarstvennost i Anarchia) ; il a été écrit par Bakounine ; le troisième : L'Anarchie selon Proudhon (Anarchia po Proudonou) ; c'est moi qui l'avais écrit, en français naturellement, et il avait été traduit en russe par B. Zaïtsef. Quant au Développement historique de l'Internationale, c'est un recueil d'articles extraits de l’Égalité de Genève, du Progrès du Locle, de la Liberté de Bruxelles, avec trois courtes notices historiques : 1° sur la fondation et le développement de l'Internationale dans la Suisse française, de 1865 à 1869 (extraits traduits du Mémoire de la Fédération jurassienne) ; 2° sur la fondation et le développement de l'Internationale en Belgique (d'après des notes fournies par moi) : 3° sur la fondation de l'Alliance de la démocratie socialiste (notice écrite par Bakounine).
  2. Le mot soïouz peut se traduire indifféremment par alliance, par union, par ligue, par confédération. Il correspond au mot allemand Bund, et celui-ci se traduisait anciennement en français par ligue : on sait qu'autrefois la confédération des huit cantons suisses, en allemand Schweizer Bund, s'appelait en français les « cantons de la Ligue de la Haute-Allemagne » (traité de 1432 entre le roi de France et les cantons suisses).
  3. Ceci est inexact, comme l'a fait remarquer Nettlau : l’Alleanza republicana universale de Mazzini ne fut fondée qu'en 1864. L'organisation mazzinienne en 1864 s'appelait Falange sacra.