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MÉDITATION SUR UNE GOUTTE DE ROSÉE

l’évoquer à dix-huit ans, coiffée de quelque vaste chapeau flexible orné de fleurs des moissons, vêtue de quelque robe de mousseline gonflée par les révérences et nouée de rubans couleur de colibri.

Dans ce château, ces jours derniers, j’ai feuilleté avec tendresse, avec lenteur, sentant monter en moi l’indicible nostalgie du passé, l’album où Mlle Sophie F. de B. a laissé déborder son cœur…

Durant qu’elle était à Paris, c’était vers 1840, elle prenait des leçons de botanique au Jardin des Plantes ! Oh ! de quel charme ne la vois-je pas entourée alors ? Qui sait de quelle âme ardemment élégante cette jeune provinciale accueillit ces couleurs qui s’irradiaient, ces parfums qui s’exhalaient de ces nouvelles ombellifères que les Laurent et Adrien de Jussieu rapportaient des îles sauvages ! Je crois voir cette ancienne adolescente, dans quelque allée de ce Jardin botanique, se haussant sur la pointe d’une bottine lilas afin d’examiner la gorge de quelque campanule velue.

Son cœur, elle l’a confié à cet album où