Page:Jammes - Le Roman du lièvre, 1922.djvu/190

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par la fenêtre ouverte sur la nuit, elle écoutait, de son lit, bruire et mourir le vent d’orage aux feuilles de l’épais figuier — et lorsqu’elle n’entrevoyait rien au delà de ce gémissement.

— M’aimes-tu ? Dis que tu m’aimes, Petit-Guilhem ? demande-t-elle.

Et les yeux de pie de l’adolescent brillent sur ceux de la jeune fille à laquelle il ne répond guère que par des caresses qu’elle compte. Puis il ferme les paupières sous le désir comme un sylvain sous un vol d’abeilles, et s’enivre au parfum de cette fleur des bois.

— Où étais-tu, hier ? Hier, je ne t’ai pas vu. Dis-moi où tu étais ? Je veux savoir où tu étais.

— Hier, j’ai conduit des touristes au Cinq-Monts.

— Ce n’est pas vrai. Je parie que tu es allé trouver la petite chevrière… Tu étais avec Maïlys. Va-t’en. Je ne t’aime plus.

— Je n’étais pas avec elle. J’étais au Cinq-Monts.

— Tu mens. Embrasse-moi ?

Et Almaïde laisse jouer sur elle cet écureuil des montagnes. Elle ne garde aucune réserve envers lui. Elle que l’on accusait, avec raison, au couvent, de trop montrer l’orgueil de sa race, elle livre aux baisers du petit pâtre l’ovale impassible et parfait de ses joues, qui fait songer au dédain