Page:Jammes - Le Roman du lièvre, 1922.djvu/242

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tout à l’heure, avec le Bon Dieu, sous la tonnelle du jardin du Paradis.

Son père lui dit :

— Tu iras là-bas cueillir des fruits. Aucun n’est du poison. Les arbres te les tendront d’eux-mêmes, sans que leurs feuilles ni leurs branches souffrent : car ils sont inépuisables.

Le poète fut rempli de joie en connaissant qu’il avait à obéir à ses parents. Lorsqu’il fut revenu du verger et qu’il eut plongé les carafes de vin dans l’eau, il vit sa vieille chienne, morte avant lui, accourir doucement en faisant aller la queue. Elle lui lécha les mains et il la caressa. Il y avait près d’elle tous les animaux qu’il avait le plus aimés sur la terre : un petit chat roux, deux petits chats gris, deux petites chattes blanches, un bouvreuil, deux poissons rouges.

Et il vit la table servie où étaient attablés le Bon Dieu, ses père et mère, une belle jeune fille qu’il avait aimée ici-bas et qui l’avait suivi au ciel, quoiqu’elle ne fût pas morte.

Il connut que le jardin du Paradis n’était autre que celui de sa maison natale, lequel est sur la Terre, dans les Hautes-Pyrénées, tout plein de lis communs, de grenadiers et de choux.

Le Bon Dieu avait posé à terre sa canne et son chapeau. Il était habillé comme les pauvres des