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Page:Jammes - Le Roman du lièvre, 1922.djvu/297

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EL-KANTARA


El-Kantara ! lorsque tu ouvris ta « porte d’or », mon âme s’épanouit en tressaillant comme la fleur de tes grenadiers luisants et magnifiques. Ta rivière dorée, coulant parmi tes lauriers roses, avait la splendeur d’une écharpe barbare. Et les raquettes foncées de tes cactus étaient pareilles aux mains tendues vers nous de noires courtisanes.

El-Kantara ! Les cigognes planaient sur tes palmiers. Elles planaient comme des rêves, ou encore comme les cerfs-volants d’octobre des enfants d’Europe. Elles regagnaient, flottantes et les pattes en arrière, les hauts nids où elles emportaient des ronces.

Sur la berge, le roseau léger tremblait comme une plume tremble aux mains du poète, et semblait inscrire sur le ciel implacable un poème d’amour. Il élevait son fuseau vers les seins dorés et sanglants des grenades prochaines.

Une éternelle volupté semblait flotter sur toi.