Page:Jammes - Le Roman du lièvre, 1922.djvu/98

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

père de remettre ces papiers à M. d’Astin… Elle est folle de songer à cela… Elle n’oserait jamais…

Elle s’habille machinalement. Cette pensée, que les lettres de l’oncle Joachim vont quitter à jamais, peut-être, la maison, la bouleverse autant qu’un scrupule religieux. Elle était, il y a vingt minutes, tout heureuse de sa promenade. Maintenant, sa joie est empoisonnée. L’idée fixe la taraude. Cependant, elle se recoiffe, met sa belle robe de mousseline et, avant de quitter sa chambre, considère longuement le portrait du grand-oncle, et lui envoie un baiser.

La porte de la chambre de petit-père est ouverte. Elle entre et le voit assis à sa table en face de plusieurs liasses de lettres. Certaines de ces liasses sont déjà cachetées ; d’autres ne sont encore que ficelées ; d’autres sont libres. L’enfant se rend bien vite compte du travail auquel est occupé son père. Elle dissimule son émotion et dit :

— Bonjour, petit père, comment avez-vous passé la nuit ?

— Bien, mon enfant. Tu me trouves en train d’effectuer un rangement de papiers d’affaires auquel je m’emploie depuis ce matin. Heureusement que je vais avoir terminé. Je n’ai plus qu’à apposer quelques cachets de cire… Mais ce sera