Page:Jammes - Le Triomphe de la vie, 1911.djvu/29

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Elle sourit. Jean la regarde faire,
aller, venir, hardie, ronde et légère,
de la cuisine à la salle à mang-er.
Elle est puissante, à l’entendre marcher,
à voir, sous sa nuque, se relever
ses cheveux blonds comme ceux des meunières.


*

Telle la vie se passe jour à jour,
sans incident. Le mois de mai bleu court.
Le fig-uier noir fraîchit, le merle est lourd.
Le tiède soir tombe sur le velours
des rosiers, noirs de fleurs bleues qui s’étouffent,
sur les g-laïeuls et les g-ueules-de-loup.
Tantôt, au matin, l’horizon brumeux
bleuit sombrement comme un fer au feu.
Et, dans le ciel, un morceau de noirceur
se déchiqueté où l’on voit, durs et bleus,
les pins trapus suspendus dans les cieux :
car on ne voit pas leurs troncs dessous eux.
Tantôt au soir, sur la prairie humide,