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Page:Janet - Le cerveau et la pensee, 1867.djvu/14

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ques indépendantes de la physiologie. Oui, ces raisons subsisteraient encore dans toute leur force, lors même que la physiologie viendrait à bout d’établir avec précision et d’une manière infaillible certaines relations rigoureuses entre l’intelligence et le cerveau. Mais enfin, tout cela admis, n’y a-t-il pas lieu de se demander si, en fait et à l’heure qu’il est, ces relations précises sont découvertes et démontrées ? N’est-il pas légitime de soumettre à la critique cette assertion de Cabanis que « le moral n’est que le physique retourné » ? Tout en reconnaissant que le physique est pour beaucoup dans l’exercice de la pensée, faut-il croire qu’il y soit tout ? Peut-on affirmer que l’on a démontré la dépendance absolue de l’âme à l’égard du corps tant qu’on n’a pas pu signaler avec rigueur et précision la circonstance décisive qui serait la cause directe et unique de l’intelligence ? Dire que cette circonstance est le poids ou le volume du cerveau, le nombre ou la profondeur de ses plis, telle forme, telle structure, telle composition chimique, etc. n’est-ce pas dire clairement qu’on ne sait pas au juste quelle est la circonstance capitale dont il s’agit ? En est-il de même en physique, lorsqu’on a découvert la vraie cause d’un phénomène ? Hésite-t-on, entre mille circonstances diverses, choisissant tantôt l’une, tantôt l’autre, à volonté, et même d’une manière contradictoire ?