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Page:Janet - Le cerveau et la pensee, 1867.djvu/76

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pas trop l’humanité. Je n’aime pas entendre un naturaliste dire « Il nous sera fort égal que le démocrate des États du Sud trouve dans les résultats de nos recherches la confirmation ou la condamnation de ses prétentions. » Après tout, pour être savant, on n’en est pas moins homme. Ne parlez pas de l’esclavage, si vous voulez, c’est votre droit ; mais, si vous en parlez, ne venez pas dire qu’il vous est égal qu’on se serve de vos arguments en faveur de l’iniquité ! J’ajouterai que, sans vouloir mêler la morale à la science, ni juger la valeur d’une dissection anatomique par ses conséquences sociales et religieuses, il est permis cependant, en présence de certains zoologistes si pressés de rabaisser l’homme jusqu’au singe et de se servir, pour le succès de leur thèse, de l’exemple du nègre, que cette thèse intéresse particulièrement, il est permis, dis-je, de demander d’où vient cette répulsion universelle que l’humanité civilisée éprouve aujourd’hui contre l’esclavage. Cette répulsion elle-même n’est-elle pas un fait ? Notre race commence à reconnaître des sœurs dans les races inférieures ; la conscience humaine franchit la question zoologique et la tranche instinctivement : voilà le grand spectacle que présente l’humanité dans le monde entier. Expliquez-nous cela. — C’est du sentiment, répondra-t-on ; mais, encore une fois, ce sentiment est un fait qui doit avoir sa raison d’être dans l’identité de nature