Page:Janet - Les névroses, 1909.djvu/30

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

pleurant son père ? Non. Il est obsédé par la pensée de l’âme de son oncle. Mais ce qui est effroyable, c’est que l’âme de son oncle est associée, juxtaposée ou confondue (nous savons que ces malades s’expriment très mal) avec un objet répugnant : des excréments humains. « Cette âme gît au fond des cabinets, elle sort du derrière de M. un tel, etc., etc. ». Il fait une foule de variations sur ce joli thème et il pousse des cris d’horreur, se frappe la poitrine : « Peut-on concevoir abomination pareille, penser que l’âme de mon oncle c’est de la m… ». Le cas est intéressant par sa grossièreté ; une idée de ce genre présente, à mon avis, un cachet tout spécial : elle avertit déjà le médecin qui ne le rencontrera guère en dehors du délire du scrupule.

J’ai beaucoup insisté sur le cas d’une jeune fille qui croit constamment voir devant elle les parties sexuelles d’un homme en train de souiller une hostie consacrée. Il est bon de remarquer qu’elle ne se borne pas à regarder ce spectacle imaginaire, à méditer sur lui, elle prétend être poussée à y collaborer, à souiller elle-même l’hostie, à commettre toutes sortes d’actes immodestes et sacrilèges. D’autres répètent sans cesse : « Je pense tout le temps que le diable me pousse à faire des malpropretés pour m’empêcher de faire mon salut ».

Enfin, ce qui est banal chez tous, c’est l’idée du blasphème, « parler mal des choses divines, penser au démon en faisant des prières et insulter Dieu au lieu de le prier…, ne savoir exprimer que la haine de Dieu d’une façon mauvaise et grossière, se révolter contre Dieu et le maudire, dire des blasphèmes dès qu’on pense à la religion… cochon de Dieu, etc. », telles sont les paroles que répètent un grand nombre de ces malades. Ceux-là mêmes qui ont des obsessions d’une autre nature mêlent la divinité et la religion à leur maladie : « Je suis damnée, je lutte contre Dieu