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Page:Janet - Les névroses, 1909.djvu/367

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Quelle que soit la solution donnée à ce problème, dans l’étude de la psychologique normale, il me semble incontestable que, dans la plupart des symptômes psychasténiques, on peut observer des troubles de cette fonction du réel. Nous avons vu qu’un très grand nombre de ces troubles consistent en sentiments d’incomplétudes, c’est-à-dire en sentiments d’inachèvement, en sentiments d’absence de terminaison à propos de la plupart des opérations. Or, quel est le défaut, quelle est la lacune que le sujet croit constater dans tout ce qu’il fait? Quand le sujet nous dit qu’il ne peut parvenir à faire un acte, que cet acte est devenu impossible, on peut remarquer qu’il ne sent plus que cet acte existe, ou peut exister, qu’il a perdu le sentiment de la réalité de cet acte. Quand d’autre nos disent qu’ils agissent en rêve, comme des somnambules, qu’ils jouent la comédie, c’est encore la réalité de l’acte par opposition au simulacre de l’acte dans les songes et dans les comédies qu’ils sont devenus incapables d’apprécier. Quand ils disent qu’ils ont perdu leur moi, qu’ils sont à moitié vivants, qu’ils sont morts, qu’ils ne vivent plus que matériellement, que leur âme est séparée de leur corps, qu’ils sont étranges, drôle, transportés dans un autre monde, c’est encore le même sentiment fondamental qu’ils expriment; ils ont conservé toutes les fonctions psychologiques, mais ils ont perdu le sentiment fondamental qu’ils expriment; ils ont conservé toutes les fonctions psychologiques, mais ils ont perdu le sentiment que nous avons toujours, à tort ou à raison, de faire partie de la réalité actuelle, du monde présent.

Il me semble qu’il en est de même quand les sujets parlent des objets du monde extérieur. Le sentiment d’absence de réalité psychologique dans les êtres extérieurs leur fait dire que les animaux et les hommes, placés devant eux, sont des morts, c’est le même sentiment relatif à la disparition de la réalité présente, qui se trouve dans les mots « irréel, rêve,