Aller au contenu

Page:Janin - L’Âne mort, 1842.djvu/166

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

prise fut grande lorsqu’à la lueur blanche et pâle du premier soleil je pus juger que les femmes du successeur de Mahomet ressemblaient à toutes celles que j’avais vues. Mon imagination désabusée ne pouvait croire à cette triste réalité, et je commençais à me repentir de mon entreprise, quand tout à coup je fus saisi par les gardes du palais.

Non-seulement il y allait de ma tête, mais encore il y allait de la vie de ces malheureuses femmes que j’avais surprises dans leur sommeil : on résolut de ne point parler de cette souillure à Sa Hautesse ; et cependant, entraîné sans bruit hors de l’enceinte formidable, je fus conduit au supplice que j’avais mérité.

Peut-être, Messieurs, ne savez-vous pas ce que c’est que le pal ? C’est un instrument aigu placé sur le haut de nos minarets, et qui ne ressemble pas trop mal à ces flèches de paratonnerres que vous avez inventées, vous autres Européens, comme pour défier le destin jusque dans les nuages. Il s’agissait de me mettre à cheval sur ce pal effilé, et pour mieux me faire garder l’équilibre, on m’attacha à chaque pied deux boulets en fer. La première douleur fut cruelle ; le fer s’enfonçait lentement dans mon corps ; et le deuxième soleil, dont les