Page:Janin - L’Âne mort, 1842.djvu/190

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dérision, trait d’esprit de quelque conseiller municipal), sur le bord des boues éternelles qui l’encombrent, je découvris quelque chose de blanc et de glacé, qui semblait attendre un moyen de se tirer de cette fâcheuse position. Mon parti fut bientôt pris : — Donne-moi ton carrick et ton chapeau, monte derrière le cabriolet ! dis-je à Gauthier. Disant ces mots, je chargeai mes épaules du carrick galonné, et, les yeux couverts du vaste chapeau ciré, je m’aventurai en véritable cocher de fiacre vers ces deux femmes.

C’était Henriette, et à côté d’elle, cette jeune et honnête femme mariée dont la décence et la douleur m’avaient frappé ; guéries en même temps toutes les deux, elles avaient été jetées toutes les deux à la porte, à demi nues, mortes de froid, l’une n’ayant pas d’asile, l’autre ne sachant comment se rendre dans le sien.

Je descendis : — Voulez-vous monter dans ma voiture ? leur dis-je. À peine eus-je parlé, qu’Henriette avait pris sa place dans le vaste cabriolet, sans se faire autrement prier.

— Je n’ose pas, Monsieur, me répondit l’autre femme ; mon mari demeure bien loin et je doute que votre course vous soit payée. En même temps elle se cachait de son mieux sous un châle noir, le seul de ses effets qu’elle n’eût