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Page:Janin - La Bretagne, 1844.djvu/28

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ses incantations magiques. C’est vous que j’atteste, pâles rochers de Kerhan[1], dolmen de Locmariaker (lieu de la belle Marie), Men ar Runn, pierres de la colline, qui dominez l’entrée du golfe du Morbihan, nobles traces, fiers souvenirs, chantés par Ossian, le poëte des Celtes : « Place-moi, Fingal, sous quelque pierre mémorable qui atteste la gloire de Calma… Cathula, dresse ma tombe sur la colline, et place sur ma tombe cette pierre grise… Ici repose, sous ce bloc, le chef de la race de Dermid. — Ces pierres diront aux siècles à venir : Ici se rencontrèrent Ossian et Cathmor, et ils se dirent des paroles de paix ! — Pierres, vous parlerez aux années qui s’élèvent derrière les siècles ! » — Dans ces chants du barde, le tombeau se retrouve toujours aussi souvent que paraît la gloire ; mais à tant de distance, qui donc pourrait dire à ces pierres : « Levez votre tête grisâtre, et dites-nous les noms des héros que vous cachez ? »

Vue sur la plaine de Karnac.

Cependant, si la pierre druidique n’a pas gardé le nom du héros qu’elle recouvre, elle a gardé son nom à elle, et ce nom-là sert à la désigner et à la faire reconnaître : Kerguelvan (pierre des pleurs), Kerroch, lieu des rochers ; ou bien le christianisme naissant s’est emparé des pierres druidiques, tout comme il s’est emparé du Capitole romain. La croix et l’image de la Vierge protègent plus d’une pierre de la plaine de Karnac ; Karnac, le cimetière aux tombes éternelles ! Les

  1. Kerhan, en breton, le champ de bataille.