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Page:Jannet - Le capital, la spéculation et la finance au XIXe siècle, 1892.djvu/17

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nécessaire en principe, mais mystérieux par bien des côtés, ouvre carrière à des aléas suspects, à des manœuvres frauduleuses. Ce trafic des capitaux, qui rend tant de services, en même temps qu’il autorise tant d’abus, n’a été étudié de près en aucun pays. En France comme ailleurs sans doute, il s’est constitué un peu au hasard par des usages qui ont acquis force de règlements. Le jour est venu de faire la lumière dans ce grand mouvement. Le régulariser, — le moraliser, s’il est possible, — est devenu pour notre temps un acte de prudence politique, une nécessité sociale[1].

Nous n’apportons pas une panacée à ce mal moderne. Nous ne nous flattons pas non plus d’avoir résolu toutes les difficultés que soulèvent des questions si complexes. Notre seule ambition est d’avoir frayé la voie et préparé la tâche nouvelle qui incombe aux moralistes par un exposé méthodique de cet ordre de faits. A défaut d’autres conditions pour traiter ces sujets délicats, nous sommes au moins étrangers à toute rancune comme à toute espérance à l’endroit de la finance et de la spéculation, et nous avons une indépendance absolue vis-à-vis des personnes. Nec beneficio nec injuria cogniti…, sine amore quisquam et sine odio dicendus est, pouvons-nous dire.

Pour prévenir tout malentendu, nous prions les personnes qui liront cet ouvrage de ne pas s’étonner si elles ne trouvent pas constamment rapproché des considérations, qui justifient la formation de la richesse, l’exposé des devoirs qui lui incombent. Nous avons développé ce point de vue aussi complètement que possible dans un ouvrage précédant : le Socialisme d’État et la réforme sociale. Nous demanderons souvent au lecteur de s’y reporter.

La question sociale n’est pas seulement une question économique. Elle est avant tout une question morale ; mais, dans les problèmes pratiques qu’elle soulève, il y a un côté

  1. Revue des Deux-Mondes du 1er décembre 1883.