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Page:Jannet - Le capital, la spéculation et la finance au XIXe siècle, 1892.djvu/16

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n’ont pas eu de prise, jusqu’à présent, sur le caractère facile et l’esprit léger des Français. Un penseur distingué nous écrivait, à propos d’un livre où nous parlions de l’ordre économique naturel : « un système, qui a permis à Rothschild d’être ce qu’il est dans la société européenne, n’est pas ce qu’il doit être. » De son côté, M. Winterer se demande si ce n’a pas été « une faute sociale que d’avoir permis au capital, à l’argent, de se donner le rôle prépondérant qu’il joue aujourd’hui, rôle qui ne lui est dû à aucun titre[1] ». Malheureusement, l’éminent écrivain ne définit pas ce qu’il entend par capital, par argent.

C’est au milieu de ces idées flottantes que nous voudrions essayer de porter un peu d’ordre et de lumière. Aussi bien, le développement des opérations de Bourse, le rôle joué dans l’équilibre général des affaires par les capitaux mobiles, les marchés à terme sur les marchandises, avec toutes les combinaisons qu’ils comportent, les concentrations de forces industrielles, sont des faits relativement récents et en relation avec un état nouveau du monde. Ils soulèvent de redoutables questions au point de vue moral et économique.

Un économiste appartenant à l’école libérale, feu André Cochut, l’indiquait il y a quelques années en ces termes :

L’émiettement de toutes les richesses en titres négociables et la transmission incessante des valeurs ainsi mobilisées est l’innovation caractéristique des temps modernes. Cette tendance a suscité un commerce déjà prépondérant, universalisé parce que la marchandise sur laquelle il opère, le capital, résumant toutes les autres marchandises, est le grand ressort de l’activité humaine. Ce commerce légitime et

  1. Le Socialisme international, coup d’œil sur le mouvement socialiste de 1885 à 1890 (Paris, Lecoffre, 1890), p. 296.