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Page:Jannet - Le capital, la spéculation et la finance au XIXe siècle, 1892.djvu/302

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ne suivaient point ces énormes écarts des prix. L’industrie sidérurgique écossaise a éprouvé de graves dommages de ces perturbations dans les cours.

L’indignation causée par cette campagne a été telle qu’un membre du Parlement a proposé un bill cherchant à régler les ventes de warrants de fontes. Mais ce projet n’a pas abouti ; car le Parlement anglais ne se prête pas, comme les législatures américaines, à édicter des lois qui restent forcément sans application pratique.

L’action de ce groupe d’agioteurs a été singulièrement facilitée, parce que, d’après les conditions du marché de Glascow, acheteurs et vendeurs de warrants sur les mois prochains ont réciproquement le droit : le vendeur d’exiger la réception anticipée, l’acheteur de demander la livraison immédiate sous déduction de l’escompte. Une pareille clause semble faite tout exprès pour surexciter l’agiotage ; car, les warrants de fonte étant forcément en quantité limitée, la connaissance que haussiers ou baissiers ont de l’état des stocks leur permet d’étrangler leurs adversaires pourvu qu’ils soient assez forts pour cela. Les fabricants de fonte, qui ont créé le marché à terme des warrants, pour n’être pas obligés d’arrêter leur fabrication chaque fois que les commandes font défaut, devraient modifier ces conditions. C’est à eux, et non au législateur, à organiser rationnellement leur propre marché. Ils pourraient trouver des modèles dans nos Caisses de liquidation françaises.

Généralement les agioteurs de notre temps ont l’intelligence de jouer dans le sens naturel du marché, c’est-à-dire en exagérant seulement ses tendances réelles au lieu d’aller à l’encontre. Aujourd’hui, avec l’abondance des informations et les progrès de la statistique commerciale, ce jugement est plus facile et la victoire tend à se fixer du côté des gros bataillons, c’est-à-dire des gros sacs d’écus. Un acheteur à terme, s’il est suffisamment riche, en multipliant ses achats, force à se racheter à tout prix les vendeurs imprudents à découvert, qui n’ont pas les reins assez solides pour livrer