Page:Jannet - Le capital, la spéculation et la finance au XIXe siècle, 1892.djvu/325

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

de défense mutuelle et auxquels on ne peut d’ailleurs reprocher la destruction d’aucun établissement rival, les trusts américains ont eu une attitude agressive et ils ont ameuté contre eux l’opinion plus encore par les clameurs des concurrents qu’ils ont anéantis que par les plaintes des consommateurs.

Pendant la campagne présidentielle de 1889 les deux grands partis avaient inscrit sur leur programme les mesures à prendre contre les monopoles et les trusts. La Chambre des représentants du Congrès ordonna à son comité des manufactures de faire une enquête sur leur existence et leurs effets. Le Sénat de l’État de New-York, où presque tous ces syndicats ont leur centre, en fit une parallèlement ; enfin, à la même époque, le Parlement d’Ottawa a fait faire par un comité spécial un examen approfondi des alleged combinations in manufactures, trade and insurance qui opèrent en Canada, mais qui, la plupart du temps, étendent leur action des deux côtés de la frontière, parce que leurs promoteurs sont des capitalistes des États-Unis. Cette dernière enquête, s’appliquant à des faits qui se passent sur un théâtre de second ordre, révèle dans le menu les pratiques journalières du commerce en Amérique.

Nous laisserons de côté les corners proprement dits ou opérations d’accaparement commercial temporaires (§ 3) pour parler seulement des combinaisons entre producteurs manufacturiers, qui affectent plus ou moins un caractère permanent. Elles peuvent se classer en quatre groupes[1].

A. — Parfois une compagnie domine le marché et fixe les prix au niveau qu’elle veut, parce qu’elle est la plus importante et que les concurrents emboîtent le pas derrière elle volontairement ou sont mis hors de combat, s’ils essayent de lutter. Telle est par exemple la Milk exchange C°, qui, en fournissant seulement le huitième du lait consommé à New-York, fait la

  1. V. un article de M. E. Benj. Andrews dans the Quarterly journal of Economies, de Boston, de janvier 1889, l’article intitulé the Theory of a trust, dans l’American law Review de janvier-février 1889, et l’article de Cyrus Field Villard on the Trusts, dans the Arena de Boston, 1890, t. II.