Aller au contenu

Page:Jannet - Le capital, la spéculation et la finance au XIXe siècle, 1892.djvu/447

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

et consignations, qui n’est qu’une succursale du Trésor. Jadis, la plus grande partie des fonds des caisses d’épargne restait en compte courant avec le Trésor. La loi de finances du 26 février 1887 a limité ce compte courant à 150 millions. Tout le reste doit être employé par la Caisse des dépôts. C’est ainsi que, dans la seule année de 1890, la Caisse a employé 349 millions et demi presque exclusivement en achats de rente 3 p. 100 et ces achats ont été savamment combinés de manière à élever les cours à chaque liquidation[1] et à préparer l’emprunt du 10 janvier 1891. Les établissements de crédit placés sous la main du ministre des Finances, le Crédit foncier notamment, ont agi dans le même sens.

Assurément, un ministre des Finances est dans son droit en cherchant à placer un emprunt au taux le plus avantageux, et en eux-mêmes ces moyens n’ont rien de répréhensible ; mais une analyse économique plus exacte fait découvrir le redoutable trompe-l’œil de cette hausse factice.

En effet le système de l’adduction forcée de toute l’épargne nationale à la dette publique fonctionne sans interruption. En 1891, les achats de rentes par la Caisse des dépôts et consignations se sont encore élevés à 319.100.000 francs et en 1892 ils continuent sur le même pied. Le 3p. 100 perpétuel, sous l’action de ces achats est monté de 82 fr. 75 à la fin de décembre 1888 à 96 50 en mars 1892. Ce mouvement ascendant n’est pas suivi par le reste de la cote et l’écart, qui s’établit entre les meilleures valeurs et la rente, montre que le taux de capitalisation est faussé. Un économiste éminent, M. Cucheval-Clarigny, a montré dans le Journal des Débats les graves dangers qui devaient en résulter. Une réaction est en effet inévitable.

L’État emploie en rentes qui lui rendent 3 francs 10 centimes pour cent des fonds sur lesquels il paye 4 p. 100. De là un déficit permanent annuel du chef des caisses d’épargne. Puis, toute vente en quantité un peu importante de ces

  1. Ce système avait été mis en opération dès 1889, Cette année, les achats de rentes pour le compte de la Caisse ont monté à près de 196 millions.