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Page:Jannet - Le capital, la spéculation et la finance au XIXe siècle, 1892.djvu/498

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contre elle, est le type caractéristique de cette nouvelle génération de banquiers. Mollien, qui l’avait pratiqué, esquisse ainsi son portrait :

C’était un Suisse qui avait longtemps habité l’Angleterre. Il avait formé à Paris une maison de banque dont il s’occupait peu. Il était versé dans tous les genres de spéculation qui se font sur les places de Londres et d’Amsterdam. Il avait fait de grands profits et des pertes souvent plus grandes. La place de Paris lui semblait trop petite pour ses opérations[1].

Les grands banquiers de l’Europe étaient déjà tous en relations suivies les uns avec les autres et se soutenaient au besoin. On peut en juger par l’opération que Ouvrard proposa au gouvernement espagnol[2].

Au moment de la paix de Bâle (1795), François Cabarrus, contrôleur des finances du roi d’Espagne, et Ouvrard conçurent le plan d’une vaste opération de change qui aurait pu avoir de grandes conséquences politiques, si l’Espagne, à qui elle fut proposée, avait osé l’adopter. Il s’agissait de procurer à l’Espagne le recouvrement de cent millions de piastres en lingots et numéraire existant dans ses colonies et qui, transporté si directement, seraient tombés infailliblement aux mains des Anglais. Ouvrard proposait de créer des lettres de change qui seraient négociées successivement sur les principales places de Hollande, d’Allemagne ou de Suisse, dont les banquiers, moyennant un courtage de 25 p. 100, feraient transporter les lingots par la voie des neutres. Charles IV et le prince de la Paix repoussèrent ce hardi projet.

Le marché universel de l’argent existait dès lors. [fin page478]

  1. Mémoires d’un ministre du Trésor, t. I, p. 70.
  2. V. A. de Janzé, les Financiers d’autrefois, p. 335.