Page:Jaurès - Action socialiste I.djvu/217

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M. Léon Bourgeois, ancien ministre de l’Instruction publique, était alors préfet du Tarn. Il vint au lycée voir les professeurs et il leur parla avec éloquence en rappelant qu’il avait été élève de l’Université dans ces années maudites de l’empire. Et il disait aux professeurs : « Alors il ne nous était pas permis de parler de la République, mais du moins on enseignait la République sous le nom de liberté. »

Et à la fin de l’empire — c’est un de vos recteurs qui me le racontait il y a quelques mois — quand on a pu espérer un commencement de réveil de la pensée libérale, M. Jules Simon faisait des tournées en province : il était alors, lui aussi, un commis voyageur, un agitateur. Il faisait des tournées en province et il convoquait les professeurs, au lycée de Rodez, notamment — c’est le souvenir précis qui m’est resté de cet entretien — il les convoquait en secret, et il leur disait : « Oui, l’empire exige de vous la servitude, le serment, la soumission aveugle ; mais avant d’être les serviteurs de l’empire, vous relevez de votre conscience d’hommes libres. » Voilà ce qu’il leur disait ; et les recteurs qui administrent à l’heure actuelle vos académies ont été élevés d’après ce langage. Je me demande comment ils feront pour être les instruments d’une politique d’asservissement.

Et depuis vingt ans, n’avez-vous pas mêlé l’Université à toutes nos luttes ?