Page:Jaurès - Action socialiste I.djvu/458

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Millerand définissait très bien, il y a quatre jours, l’attitude du parti socialiste français pendant les fêtes franco-russes : « Il regarde, il écoute et il attend. » L’essentiel pour nous, en effet, pendant ces grandes manifestations à la fois gouvernementales et populaires, était de saisir le véritable sentiment de la foule. Nous connaissons celui des ouvriers vraiment socialistes ; comme nous, tous, ils veulent la France libre et forte, et comme nous ils pensent que seul l’avènement politique du prolétariat international assurera à l’Europe la paix, à toutes les nations la justice. Mais il y a, en dehors des groupements socialistes proprement dits, une foule immense où notre doctrine n’a point vraiment pénétré encore ; et c’est elle qui, par ses mouvements, par son instinct, peut faire les événements et décider de la patrie ; c’est d’elle, je l’avoue, que nous redoutions un pareil excès d’enthousiasme et d’irréparables entraînements ; et nous avons constaté avec une joie profonde que, dans toutes ces fêtes, elle est restée parfaitement maîtresse d’elle-même. Elle a fait éclater sa joie sans rien perdre de sa sagesse et de sa fierté ; nous l’avons vue curieuse et vivante, et vibrante, flattée aussi d’une visite qui lui semblait un hommage à la France républicaine ; mais elle ne s’est point livrée ; elle est restée capable de réflexion et de contrôle, et dans quelques jours, quand le Parlement aura à