Page:Jaurès - Action socialiste I.djvu/554

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jusqu’ici qu’un leurre pour nous ; or, quelle que soit la puissance de la marine anglaise, quelque précieux que soit à l’Angleterre le concours des États-Unis et du Japon, les péripéties et le résultat d’une lutte aussi vaste échappent à toute prévision humaine. Et si la lutte se prolongeait avec des chances incertaines, l’Allemagne pourrait bien imposer son arbitrage, et l’Angleterre, en combattant la France et la Russie, aurait fait seulement le jeu de l’industrie allemande, qui déjà la menace sur tous les marchés. Enfin, dans l’hypothèse même d’une victoire, les États-Unis et le Japon feraient payer leur concours ; ils voudraient profiter du succès commun pour agrandir leurs affaires, et l’Angleterre n’aurait disputé la Chine à l’influence russe que pour la livrer aux convoitises japonaises et au capitalisme américain.

La paix n’en reste pas moins très précaire ; elle est à la merci d’un accident, et si la guerre éclate, elle sera terrible et vaste. Pour la première fois, il y aura une guerre universelle, mettant aux prises tous les continents ; l’expansion capitaliste a élargi le champ de bataille ; c’est toute la planète qui sera rougi e du sang des hommes. Et c’est l’acte d’accusation le plus terrible qui puisse être porté contre le capitalisme : il fait planer sur l’humanité un péril de guerre permanent et tous les jours plus étendu ; à mesure que l’horizon humain s’agrandit, la sombre nuée de la guerre