Page:Jaurès - Histoire socialiste, II.djvu/106

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sont pas des opinions théologiques, mais bien évidemment des principes de troubles, des motifs de sédition, des germes de discorde et de guerre intestine. Je demande s’il y a de la dureté, s’il y a de la persécution de la part du législateur à vouloir prévenir ces troubles, en obligeant des prêtres suspects de tenir à un système aussi contraire à l’ordre social, à la prestation d’un serment civique. Je demande si l’on peut accorder à ceux qui refusent de s’y soumettre la faculté d’exercer un prétendu culte particulier, qui ne diffère véritablement du culte salarié par l’État, qu’en ce que les ministres de ce dernier ont eu le mérite de se montrer citoyens et de coopérer par leur patriotisme à la Révolution qui nous a rendu la liberté et l’égalité des droits.

« Messieurs, je me résume.

« L’Église est dans l’État et l’État n’est pas dans l’Église. Vous ne commettrez point la faute d’admettre un empire dans un empire ; vous ne subordonnerez point la société générale, la grande famille, le peuple souverain, dont les intérêts vous sont confiés, à l’ambition et à la cupidité de quelques individus. Vous direz à ces individus que, s’ils sont de bonne foi, ils ne doivent pas se refuser à en donner la preuve, que si leur Église veut être reçue dans l’État, il faut qu’elle se soumette aux lois de l’État ; qu’il faut que ses ministres prêtent serment d’obéissance et de fidélité à l’État. » (Applaudissements répétés.)

Comme on voit, la Législative est plus éloignée encore, s’il est possible, que la Constituante, de toute idée de séparer l’Église de l’État. Au contraire, l’Église doit être liée par la loi de l’État, par la loi de la Révolution. Et nous-mêmes, le jour où la République aura supprimé le budget des cultes et dénoncé le Concordat, nous ne devrons pas oublier la forte pensée révolutionnaire ; et l’organisation ecclésiastique, ne devra pas former « un empire dans un empire ».

Sous l’impression des vigoureuses paroles de Neufchâteau, la Législative vota le 29 novembre 1791 toute une loi de police religieuse, autour de laquelle vont se livrer de grandes batailles et qu’il importe de faire connaître en entier dans son texte même.

« L’Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport des commissaires civils envoyés dans le département de la Vendée, les pétitions d’un grand nombre de citoyens et le rapport du Comité de législation civile et criminelle sur les troubles excités dans plusieurs départements du royaume, par les ennemis du bien public, sous prétexte de religion ;

« Considérant que le contrat social doit lier comme il doit également protéger tous les membres de l’État ;

« Qu’il importe de définir sans équivoque les termes de cet engagement, afin qu’une confusion dans les mots n’en puisse opérer une dans les idées ; que le serment purement civique est la caution que tout citoyen doit donner de sa fidélité à la loi, et de son attachement à la société, et que la diffé-