Page:Jaurès - Histoire socialiste, II.djvu/523

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

petit réfectoire ; corps de garde sur la rue des Cordeliers. Assemblée générale dans l’église Saint-André-des-Arts.

« Gravilliers. — Cette section occupe pour son comité militaire, une pièce au rez-de-chaussée, à droite, en entrant dans la seconde cour, plus une salle dite le chapitre pour ses assemblées générales. »

Ces détails suffisent à fixer, pour ainsi dire, les traits matériels, la vie des sections. Je renvoie pour le tout au si utile travail de M. Mellié sur les sections de Paris. Chacune de ces sections ainsi installée, outillée, souvent dans des locaux arrachés à l’Église par la grande expropriation révolutionnaire, représentait une grande force éveillée et active. Et dès juillet, sous la menace de l’invasion, sous la trahison du roi, les forces révolutionnaires de chaque section se rapprochent, se rallient à un centre : la Maison commune. La municipalité légale, malgré le bon vouloir de Pétion, ne pouvait servir de lien à des forces d’insurrection ; elle était trop mêlée, trop discordante, et Pétion lui-même était timide et gêné. Mais à côté de la municipalité légale, les délégués des sections réunis à la Maison commune constituent une sorte de municipalité extra-légale, destinée, à mesure que s’enflamment les événements, à subordonner et enfin à remplacer l’autre.

Le 23 juillet, les commissaires nommés par les sections de Paris se réunissent pour délibérer sur une adresse à l’armée. En soi, cette réunion était légale ; car chaque section avait, d’après la loi, seize commissaires et ces commissaires des sections pouvaient se réunir pour comparer et centraliser le résultat des délibérations prises par les différentes sections ; mais si la réunion dans son mécanisme même était légal, son objet était révolutionnaire, puisqu’il s’agissait de mettre l’armée en garde contre les perfidies du pouvoir exécutif. 32 sections sur 48 adhérèrent au projet d’adresse à l’armée voté par la section du Marché des Innocents.

Mais les sections décident une démarche bien plus importante. Les commissaires des sections réunis à la Maison commune constatent, par des procès-verbaux des 26, 28, 29 juillet, 1er, 2 et 3 août, que toutes les sections de Paris ont adhéré au vœu de la section de Grenelle pour une adresse demandant la déchéance du roi, et cette adresse devait être portée à l’Assemblée législative, au nom de toutes les sections, par le maire Pétion. Ainsi le pouvoir légal lui-même était entraîné à des démarches, qui, constitutionnelles dans la forme, étaient essentiellement révolutionnaires.

Pendant que les sections de Paris s’entendaient pour une manifestation collective, le duc de Brunswick, commandant de l’armée prussienne, avait lancé de Coblentz un manifeste insolent et menaçant qui exaspérait la France et perdait décidément le roi. Daté du 25 juillet, ce manifeste était connu à Paris le 1er août, où un exemplaire en était remis au président de l’Assemblée. C’était pour Louis XVI, c’était dans son intérêt que, selon le manifeste,