Page:Jaurès - Histoire socialiste, IV.djvu/278

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qui n’étaient pas non plus de simples instruments entre ses mains. Ils avaient trop ou trop peu de pouvoir.

D’autre part, le Comité de défense générale, qui était formé de trois membres élus par chacun des sept comités de la Convention, et qui siégeait depuis le 4 janvier, avait deux défauts aux yeux des trois grands révolutionnaires. D’abord il était dominé par les Girondins, qui avaient d’emblée affirmé leur primauté par la nomination de Kersaint comme président, de Brissot comme vice-président, de Guyton-Morveau et de Fonfrède comme secrétaires. Tout récemment, le 4 mars, c’est Pétion, de plus en plus lié à la Gironde, qui avait été nommé président. Mais surtout ce Comité avait fait preuve d’une incohérence, d’une incapacité de vouloir déplorable. Il avait flotté sans cesse entre des politiques contradictoires.

Le Comité de défense fut-il paralysé, en janvier et février par la lutte de Danton et de la Gironde ? C’est ce que Barère indique dans un passage de ses Mémoires, mais où abondent les inexactitudes. Ses souvenirs étaient étrangement flottants et vagues. Il écrivait, il est vrai, à plus de trente ans de distance ; mais il semble, puisqu’il se réfère lui-même souvent au Moniteur, qu’il aurait pu le consulter. Il accumule les erreurs. Il dit dans une note sur le Comité de défense générale :

« Les événements se pressaient dans la guerre de Belgique ; nos généraux faisaient ressembler cette guerre à une simple promenade militaire, surtout depuis la bataille de Jemmapes, où la bravoure des volontaires nationaux et de ceux de Paris principalement emporta de vive force des redoutes formidables. Pendant ce temps, les séances du Comité de défense générale, qui se tenaient au couvent des Feuillants, occupaient l’attention des principaux députés. Ce Comité, dont on a trop peu parlé, avait cependant rendu de grands services, d’abord avant le Dix-Août, et ensuite dans les mois de novembre et décembre 1792, jusqu’à la formation du premier Comité de salut public, le 5 avril 1793. Le Comité de défense générale s’occupait de préserver nos frontières méridionales des attaques des Espagnols, et il régularisait, autant qu’il était possible, la marche des armées et des contributions de guerre en Belgique.

« Si ce Comité ne s’était occupé que de ces deux objets, il aurait fait plus de bien ; mais, au mois de décembre, il appela tous les généraux à Paris et laissa tout stagnant dans les armées ; enfin il prépara mollement les armements et les approvisionnements pour la grande guerre qui nous menaçait au printemps de 1793. Ce qui annula encore davantage ses opérations, c’est une discussion très passionnée et inextricable au sujet des correspondances établies par les généraux avec le Comité, et surtout au sujet des intelligences secrètes que l’on prétendait avoir été entretenues depuis plusieurs mois avec le général Dumouriez, qui avait les principales forces à sa disposition.

« Alors on vit s’engager, dans le Comité de défense générale, la discus-