Page:Jaurès - Histoire socialiste, IV.djvu/555

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si elle avait signifié au peuple de Paris, par proclamation et affiches, qu’il ne devait pas déposer les armes avant que la Convention, investie par lui, eût cassé la Commission des Douze et rejeté les vingt-deux, si elle avait ajouté que les magistrats municipaux allaient prendre la tête du mouvement et affronter les premiers le péril, peut-être ce mot d’ordre violent et précis aurait-il hâté l’insurrection incertaine et languissante. Mais la Commune avait peur d’être débordée par les Enragés si elle-même déchaînait et précipitait le mouvement. Elle avait l’espoir que de la vaste manifestation, un peu diffuse et pacifique, se dégagerait cependant pour la Convention une sommation assez nette. Pache voulait garder contact avec la Convention comme avec le comité révolutionnaire de l’Évêché, et il surveillait les événements plutôt qu’il ne les passionnait. Michelet va au delà de ce qu’il est permis d’affirmer quand il dit que dès le début de la journée il y eut conflit de tactique entre le comité révolutionnaire de l’Évêché et la Commune reconstituée :

« La Convention mande le maire ; que fera-t-on ? Varlet et les plus violents ne voulaient pas qu’on obéit ; ils prétendaient que le maire fût consigné comme le fut Pétion pendant le combat du 10 août. D’autres plus sages (Dobsent en tête, d’accord avec la Commune) pensèrent que rien n’était organisé encore, qu’on ne savait pas seulement si le nouveau commandant serait reconnu de la garde nationale ; ils décidèrent qu’on obéirait et que Pache irait rendre compte à la Convention. Tel fut le premier dissentiment. »

Mais il n’y en a pas trace dans les comptes rendus que nous avons. Je vois bien que le lendemain, 1er juin, à la Commune, Varlet se plaint que le maire n’ait pas été consigné pendant vingt-quatre heures, parce que « étant revêtu d’une autorité légale, il peut être nuisible à la révolution ». Je vois bien aussi qu’il se plaint que Dobsent ait contrarié les opérations du comité révolutionnaire. Mais tout cela, c’est un jugement porté après coup sur la journée du 31 mai. Et rien ne démontre que Varlet ait proposé le 31 mai au matin ce qu’il regrette le 1er juin qui n’ait pas été fait. Qui sait même si Varlet, qui était président provisoire du comité révolutionnaire, et qui devait se complaire en ce premier rôle, assistait à la séance du Conseil général de la Commune ?

Si, le 31 mai au matin, à propos de la lettre de la Convention qui mandait Pache, un incident de cette gravité s’était produit, si plusieurs délégués révolutionnaires avaient proposé de braver la Convention, le compte rendu l’aurait sans doute noté, car il s’arrête assez longuement aux discussions provoquées par la démarche de Pache :

« On donne lecture d’une lettre par laquelle le président de la Convention nationale invite le citoyen maire à se rendre dans son sein pour lui rendre compte de l’état actuel de Paris.