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Saint-Germain-des-Prés avait malheureusement été détruite par un incendie dans la nuit du 2 au 3 fructidor an II (19 au 20 août 1794).

Le Musée du Louvre, après divers retards, avait été ouvert le 18 brumaire an II (8 novembre 1793) et le projet de constituer des musées dans les départements date de cette même année : le 10 fructidor an III (27 août 1795), on ouvrait celui de Toulouse ; d’autres musées s’ouvrirent notamment à Marseille, Lyon, Avignon, Rennes (rapport le Daubermesnil aux Cinq-Cents, le 3 vendémiaire an VII-24 septembre 1798). Quant au Musée du Louvre, je dois constater que, dès la fin de l’an II, on eut recours, pour l’enrichir, à un procédé qui ne saurait être trop flétri. Des chefs-d’œuvre de l’école flamande étaient enlevés de Belgique et expédiés à Paris aux applaudissements de Grégoire (rapport, cité plus haut, du 14 fructidor an II) pour qui cela n’était pas du vandalisme, au contraire ; dans la séance de la Convention du 4e jour sans-culottide de l’an II (20 septembre 1794), Guyton de Morveau annonçait « l’arrivée du premier envoi des superbes tableaux recueillis dans la Belgique ». Ces spoliations, ces indignes abus de la force, que Bonaparte et le Directoire devaient en Italie, sur une plus grande échelle, l’un commettre, l’autre encourager, furent réprouvés, à la fin de l’an IV (septembre 1796), mais rien que pour l’Italie, dans une brochure de Quatremère de Quincy intitulée Lettres sur le préjudice qu’occasionnerait à la science le déplacement des monuments de l’Italie ; à la suite de la brochure figurait une pétition dans le même sens signée, sans distinction d’opinions, par de nombreux artistes tels que Lethière, Fontaine, Percier, Moreau jeune, Lesueur, Pajou, David, Suvée, Vien, Girodet, Boizot, Soufflot, Roland. Il est vrai que d’autres, parmi lesquels Isabey, Gérard, Carle Vernet, Lenoir, signèrent, en sens contraire, une pétition publiée dans le Moniteur du 12 vendémiaire an V (3 octobre 1796). Ce qu’on prit ainsi fut repris plus tard ; cependant est restée au Muséum la collection d’histoire naturelle du stathouder sur les biens duquel « la France croit devoir exercer un droit… qui lui est acquis par la force des armes », avait tranquillement écrit, le 21 ventôse an III (11 mars 1795), à l’assemblée batave, notre représentant près l’armée du Nord, Alquier (Moniteur du 13 germinal-2 avril 1795). À la suite d’une proposition du général Pommereul, l’auteur, en l’an IV, des Institutions propres à faire fleurir les arts en France, Benezech, ministre de l’Intérieur, par un arrêté du 23 floréal an V (12 mai 1797), adjoignit au Musée du Louvre, sous le nom de Chalcographie française, un établissement chargé de l’exécution de gravures, soit à l’aide des planches anciennes dont il devenait le dépositaire, environ un millier, soit avec les planches nouvelles qu’il ferait exécuter, et de la vente des épreuves. Cette vente était complètement organisée le 1er prairial an VII-20 mai 1799 (recueil d’Aulard, t. V, p. 517).

La collection de monuments de l’ancienne statuaire française et d’objets d’art, formée par Alexandre Lenoir et dispersée par la Restauration, avait été