Page:Jaurès - Histoire socialiste, V.djvu/246

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par minute sans viser. Au début de l’an III (fin 1794), les résultats étaient (Essai sur l’histoire des sciences pendant la Révolution, de Biot, p. 81) : 15 fonderies pour la fabrication des bouches à feu de bronze, fournissant annuellement 7 000 pièces ; 30 fonderies pour les bouches à feu en fer donnant par an 13 000 canons ; la multiplication dans la même proportion des usines pour la fabrication des projectiles et des attirails d’artillerie : une immense fabrique d’armes à feu créée à Paris, livrant 140 000 fusils par année ; l’établissement d’une manufacture de carabines — la carabine, lit-on dans le chap. xviii des Cours faits à l’École de Mars du 5 fructidor an II (22 août 1794) au 13 vendémiaire an III (4 octobre 1794) et imprimés en l’an III par ordre du comité de salut public, diffère du fusil « en ce que le canon est rayé dans l’intérieur pour donner à la balle une direction plus exacte et une portée plus grande » — dont la fabrication était nouvelle en France ; 20 manufactures d’armes blanches ; 188 ateliers de réparation pour les armes de toute espèce. Si l’arsenal de Paris et les 10 autres existant en province subsistèrent nominalement jusqu’au commencement de 1798 (an VI), ils disparurent à cette époque. Dès 1797, il n’y avait plus que 2 fonderies. De 37, les ateliers de construction d’artillerie furent réduits à 12 en 1796, et à 6 en 1797. Le nombre des forges, des manufactures d’armes à feu portatives et d’armes blanches, des ateliers de réparation pour ces armes alla aussi en diminuant (Revue d’histoire rédigée à l’état-major de l’armée, mai 1901, p. 1135). Dans les établissements s’occupant du matériel de l’armée, des fonctionnaires civils avaient été substitués, pour la surveillance des travaux, aux officiers qui y avaient été détachés, à la fin de l’ancien régime, sur l’initiative de Gribeauval. La compétence de ces fonctionnaires semble, du moins dans notre période, avoir laissé à désirer. Une lettre, du 21 ventôse an IV-11 mars 1796 (Chevalier, Notice historique sur le service des forges, p. 8), d’un chef de brigade commandant l’artillerie de l’aile droite de l’armée de Rhin-et-Moselle, se plaint « de la mauvaise construction du matériel et de la mauvaise qualité des matières employées », et elle réclame l’organisation de la surveillance par des officiers d’artillerie. En tout cas, les inspecteurs civils furent, par une décision de pluviôse an V (janvier 1797), supprimés à dater du 1er ventôse suivant (19 février 1797), et des officiers d’artillerie les remplacèrent dans les forges et les fonderies travaillant pour l’armée. Nous verrons, d’ailleurs, au début du chap. xviii que, en admettant que les officiers eurent la compétence, ils n’eurent pas toujours l’honnêteté indispensable. L’ouvrage que je viens de citer contient aussi (p. 10), relativement à une autre modification survenue dans le régime de ces établissements, une note se plaignant « des adjudications au rabais pour les fournitures de l’artillerie qui sont des fournitures de confiance et sur lesquelles un fripon trompera toujours malgré la surveillance ».

Au début, en effet, avait dominé, pour tous ces établissements, le système de régie directe par l’État ; mais la Convention, après le 9 thermidor,