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travail. Le rapport de police du 3 thermidor an V (21 juillet 1797) signale des « colloques » entre ouvriers et croit que ces ouvriers dont les plus nombreux sont les ouvriers de forges et de fonderies » (recueil d’Aulard, t. IV, p. 226) « se concertent pour rabattre d’autorité encore une heure sur le temps de leur journée » ; suivant le rapport des 25 et 26 brumaire an VI (15 et 16 novembre 1797), « les ouvriers charpentiers se rassemblent et paraissent établir une lutte avec leurs maîtres, motivée sur une demi-heure de travail de plus que ces derniers exigent d’eux » (Idem, t. IV, p. 452) ; « des compagnons maçons, dit le rapport du 23 floréal suivant (12 mai 1790), se sont portés hier, vers 6 heures et demie, dans une manufacture de porcelaine du faubourg Antoine, pour engager les ouvriers de cette manufacture à quitter leurs travaux à cette heure ; ils s’y sont refusés » ; d’après le rapport du lendemain, 24 floréal (13 mai), « un grand nombre d’ouvriers de dillérents états se sont réunis dans un cabaret des Percherons pour fixer les heures du travail » (id., p. 658 et 661).

Enfin, tandis que, dans la Décade philosophique du 20 thermidor an VI-7 août 1798 (t. XVIII, n° 32) on proteste, à propos de la célébration du décadi, contre « les jours de repos fixes et périodiques », et qu’on demande « une fête par mois et le travail tous les jours » ; tandis que dans le Patriote français du surlendemain (22 thermidor-9 août), on déclare qu’une des supériorités du décadi sur le dimanche, c’est de fournir « moins de jours pour le repos ou la paresse » (recueil d’Aulard, t. V, p. 31), nous voyons, par un rapport de la même époque (16 thermidor-3 août) du bureau central du canton de Paris, que tel n’était pas l’avis des travailleurs parisiens : « Si l’affluence, dit, en effet, ce rapport, est moins sensible depuis quelque temps dans les temples catholiques, elle n’est pas moins remarquable sur la voie publique les jours correspondant au dimanche, qu’une certaine classe du peuple consacre opiniâtrement au repos sans aucun motif de religion » (Idem, t. V, p. 25).

Pour les employés du gouvernement « chargés de l’expédition des affaires par écrit », je signalerai l’arrêté du Directoire du 5 vendémiaire an VII (26 septembre 1798) portant (art. 3) que ces employés « seront tenus de se trouver à leur poste pendant 7 heures au moins tous les jours excepté les décadis et les fêtes nationales », et (art. 4) que « les heures de travail pour les employés à Paris sont fixées depuis neuf heures du matin jusqu’à quatre après-midi ».

L’exploitation industrielle de la femme, de la jeune fille et de l’enfant existait déjà ; elle s’était même systématisée, peut-on dire, dans une certaine mesure et développée, à la suite des levées en masse qui avaient diminué considérablement le nombre des ouvriers disponibles. À la papeterie de Buges, nous l’avons vu tout à l’heure, en l’an II, il y avait à peu près autant de femmes que d’hommes et, sur les 83 enfants, il y en avait quatre n’ayant que onze ans (Gerbaux, p. 50, 55, 57, La papeterie de Buges). Le Journal