Page:Jaurès - Histoire socialiste, V.djvu/58

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batteries du 8e régiment d’artillerie, sous les ordres du chef de bataillon Lahure (Bonnal, La guerre de Hollande et l’affaire du Texel). Les Anglais ayant évacué Kampen et Zwolle dès l’arrivée à Harderwijk de l’avant-garde de Pichegru, celui-ci marcha tout de suite sur l’Ijssel. L’armée de Sambre-et-Meuse, rendue libre par la retraite de l’ennemi, avait remplacé l’armée du Nord aux alentours de Clèves ; sa division de gauche reçut l’ordre d’occuper Doesborgh et de garder l’Ijssel et le Rhin à l’est d’Arnhem. Cette division, une seconde de l’armée de Sanbre-et-Meuse et celle de Moreau constituèrent sur la rive droite du Rhin un corps d’observation d’Emmerich à Enschede, tandis que la division Macdonald, de l’armée du Nord, pénétrait dans la province de Groningue dont les Anglais tenaient encore une partie. Ceux-ci avaient évacué Coevorden où entrait, le 23 pluviôse (11 février), un bataillon de grenadiers qui avait fait, le dégel étant venu, près de deux lieues dans l’eau jusqu’à la ceinture. Le 1er ventôse (19 février), les Français étaient à Groningue et atteignaient ensuite l’Ems où le dégel les arrêtait. Pendant ce temps, Moreau expulsait l’ennemi du comté de Bentheim et la forteresse de ce nom tombait entre ses mains. Le territoire des Provinces-Unies se trouvait dégagé ; les Français étaient maîtres de toute la rive gauche du Rhin, de la Suisse à la mer du Nord.

Sur les Alpes, ils étaient maîtres de la chaîne depuis la Méditerranée jusqu’au mont Blanc. Après le départ pour Paris de Robespierre jeune (début de messidor-fin juin) avec un plan d’opérations combinées des armées des Alpes et d’Italie, l’armée des Alpes, dont le général Petit Guillaume avait, le 16 messidor (4 juillet), reçu du général Dumas le commandement en chef par intérim — le général Moulin devait être nommé à ce poste le 17 vendémiaire an III (8 octobre 1794) et prendre le commandement le 11 frimaire (1er décembre) — se préparait à assiéger Exilles et à marcher, conjointement avec l’armée d’Italie commandée par le général Du Merbion, sur Coni ; comprenant le danger, l’archiduc Ferdinand, gouverneur de la Lombardie, se décidait enfin à soutenir les Sardes, et un corps autrichien s’avança en Piémont. Les troupes républicaines étaient déjà arrivées à Boves, quand elles reçurent (20 thermidor-7 août) l’ordre de se replier sur le col de Tende. Trois jours avant s’était produit un incident dont j’emprunte le récit textuel à Jomini (t. VI, p. 104) :

Le duc de Monferrat « se présenta, le 4 août, en ordre processionnel, sous la bannière de la Vierge, avec dix à douze mille paysans soutenus de quelques bataillons de ligne, devant Garessio. Les éclaireurs de la 46e brigade, étonnés de ce spectacle nouveau, dans une saillie de valeur folle, caractéristique de l’esprit du temps, passèrent leurs fusils en bandoulière, et marchèrent en dansant à la rencontre de ces ennemis de nouvelle espèce. Le combat ne fut ni long ni sanglant : les soldats de la Vierge prirent la fuite, après quelques décharges mal ajustées. Les républicains, dédaignant